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 PARIS – LA SEINE 
 (D'après Paris,
    450 dessins inédits d'après nature,
  paru en 1890) La part spéciale de la Seine, les canaux mis à part, dans la
  traversée de Paris, qui est de 12 kilomètres depuis l'écluse
  du Port-à-l'Anglais en amont jusqu'au barrage de Suresnes en aval, est
  de 20,090 bateaux, portant 3,671,098 tonnes, y compris le transit de 5,609
  bateaux portant 873,091 tonnes. Il reste ainsi pour le trafic spécial,
  c'est-à-dire pour les expéditions de Paris et les arrivages à Paris,
 14,481 bateaux et 2,798,007 tonnes. Sur ces derniers chiffres, les expéditions
  des ports de Paris comprennent 4,687 bateaux chargés de 818,309 tonnes,
  et les arrivages aux ports de Paris 9,794 bateaux chargés de 1,979,698
  tonnes. Ces 20,000 bateaux chargés, qui desservent les vingt et un ports
  de Paris, ne composent pas tout l'armement et le mouvement de la Seine. Il
  y faut ajouter le déplacement d'un grand nombre de bateaux vides ; en
  1886, les passages relevés à l'écluse de Port-à-l'Anglais
  se sont élevés à 25,174 bateaux, et ceux de barrage de
  Suresnes à 18,635. Dans ces chiffres ne sont pas compris les entreprises
  de transports à vapeur, Hirondelles, Bateaux-Express, au nombre de 108,
  qui ont chargé en 1886 le chiffre énorme de 21,403,462 voyageurs,
  et ces services sont appelés à se développer pour ainsi
  dire indéfiniment.|  
 
      | Petit bras de la Seine, entre la Cité
        et le quai des Augustins. | 
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 Il faut compter en plus la flottille des petites embarcations, bateaux de
  plaisance, bachots de pêche, canots de course et de promenade, dont le
  nombre va toujours croissant, plus les nombreux bateaux-lavoirs, les établissements
  de bains d'eau chaude, et, dans la belle saison, les établissements
  de bains froids en pleine eau, écoles de natation, etc. On comprend qu'un pareil développement d'activité à la
  surface et sur les bords du fleuve exige une police particulière, une
  surveillance de tous les instants ; elles sont confiées à un
  service public dénommé Inspection générale de la
  navigation. Son organisation a beaucoup d'analogie avec celle de l'inspection
  des voitures de place dans les rues de la ville. Nulle embarcation ne peut
  circuler sur la Seine sans être munie d'un permis délivré par
  l'inspecteur général. Ce permis, 
 revêtu d'un numéro
  d'ordre qui doit être peint d'une façon apparente sur le bateau
  ou l'embarcation, coûte 1 fr. 50 et est renouvelable chaque année.
  Il avait été délivré en 1883 4,290 permis pour
  petites embarcations ; le nombre s'est élevé à 5,119 en
  1886. La plupart de ces permis sont à destination de la banlieue parisienne
  ; on n'en compte que 250 pour l'intérieur de Paris.|  
 
    | Bains froids du pont des Saints-Pères.  | 
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 Alignons encore
    118 bateaux porteurs, 75 remorqueurs, 21 toueurs, 130 bateaux à vapeur
    de plaisance, 39 dragues, pontons ou épuisettes, et l'on se fera une
    idée de l'encombrement habituel de la Seine, au moins égal,
    entre certains ponts d'amont, à l'encombrement des rues commerçantes
    de Paris aux points les plus fréquentés. Phénomène
    singulier, les accidents sont moins fréquents dans le parcours du
    fleuve que dans celui des rues. Sur une circulation incessante d'au moins
    20,000 bateaux de commerce, 33 seulement ont sombré par suite d'accident
    ou de fausse manœuvre et 108 bateaux à voyageurs ont subi 53
    collisions. Quatre-vingt-six accidents en une année, c'est moins qu'on
    ne compte d'accidents de voitures en un seul jour. Une activité si prodigieuse, de si puissants moyens de transports,
  une telle masse d'échanges impliquent l'existence d'une population nombreuse,
  vivant des industries de la rivière, mariniers, porteurs, commissionnaires,
  déchargeurs,  débardeurs, etc., etc., les uns vivant sur la rivière
  même, les autres sur ses bords. C'est encore l'inspecteur général
  qui a charge d'âmes, au moins d'âmes fluviatiles. Le chef tout-puissant
  des Nautes parisiens, c'est aujourd'hui l'inspecteur général
  de la navigation. Sa juridiction est tout amiable et conciliante. M. Guillaumin,
  l'inspecteur général, a terminé en 1886 ou fait terminer
  par ses sous-ordres 38 différends survenus entre des mariniers. Ces
  braves gens paraissent en général fort paisibles ; la plupart
  de ceux qui conduisent les grosses péniches à la remonte de la
  rivière y sont logés avec leurs femmes et leurs enfants. Qui
  n'a vu, sur ces bateaux amarrés le long des quais, une forte femme au
  teint hâlé, aux bras vigoureux retroussés jusqu'aux coudes,
  allaitant ou nourrissant sa marmaille, qu'il est inutile de débarbouiller
  au milieu du charbon ou du plâtre, le tout sous la surveillance attentive
  et muette d'un gros chien, qui vaut à lui seul deux hommes d'équipage
  ? C'est encore là l'un de ces spectacles gratuits chers à cette
  badauderie parisienne qui, en apparence, se désintéresse de tout
  et qui, en réalité, ne se lasse jamais de rien.|  
 
      | La Seine et le Palais du Trocadéro vus
        du Pont de la Concorde. | 
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