Histoire de Paris
Cette rubrique vous livre l'histoire de Paris et de ses arrondissements. Origine, évolution, de la capitale de la France. Pour mieux comprendre la physionomie du Paris d'aujourd'hui, plongez-vous dans les secrets de son passée.
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HISTOIRE DE PARIS
(D'après Paris à travers les âges, histoire nationale de Paris et des Parisiens depuis la fondation de Lutèce jusqu'à nos jours, paru en 1879)

Charles VI. — Les impôts. — Hugues Aubriot condamné. — Les Maillotins. — Duel judiciaire entre Jean de Carrouges et Jacques Le Gris. — Les pâtés de chair humaine du barbier et du pâtissier. — Entrée de la reine Isabeau. — L'assassinat d'Olivier de Clisson par Pierre de Craon. — L'hôpital du Roule. — Le collège d'Aurillac. — Les juifs battus de verges. — Odette la petite reine de Charles VI. — Exécution des faux guérisseurs. — L’empoisonnement de Jean Le Charton. — Les premiers théâtres. — Les confrères de la Passion. — Les pages et écoliers. — Le duc d'Orléans assassiné. — Le grand hiver de 1407. — La paix fourrée.

Après Charles le Sage, Charles le Fou ! Charles VI n'avait que douze ans, lorsqu'il fut appelé à succéder à son père, et, encore une fois, les Parisiens se trouvèrent gouvernés par un enfant, en butte à l'ambition démesurée de ses trois oncles, qui ne songèrent qu'à se disputer l'autorité royale et à satisfaire leur rapacité.

Cette triple rivalité au sujet du gouvernement fut une source continuelle de dissensions et de cabales. Le duc d'Anjou voulait la régence et l'autorité absolue, ses deux frères voulaient s'adjoindre à lui et le conseiller selon leurs vues, c'est-à-dire qu'ils aspiraient l'un et l’autre à la régence. Pour soutenir leur droit ou leur convoitise, chacun d'eux fit des levées d'hommes, et bientôt les environs de Paris se garnirent de troupes.

A son lit de mort, Charles V avait rendu une ordonnance abolissant tous les impôts qu'il avait précédemment établis, mais le duc d'Anjou se garda bien de la publier et contrairement à la volonté du roi défunt, il augmenta ces mêmes impôts. Alors les Parisiens indignés se soulevèrent. Deux cents hommes du peuple coururent à la maison de Jean Culdoé, prévôt des marchands, et l'obligèrent à venir avec eux au palais trouver le régent et lui remontrer combien le nouvel impôt dont il grevait la population, au moment où la misère était si grande, était de nature à provoquer le plus vif mécontentement.

Ce magistrat accéda à leur voeu et se rendit avec eux auprès du duc d'Anjou auquel il représenta l'impopularité dont il allait se couvrir, et ses paroles firent une telle impression sur le régent qu'il jugea prudent de parlementer doucement et de promettre qu'aussitôt après le sacre du roi, il aviserait. Ce sacre eut lieu à Reims le 4 novembre 1380.

Le dimanche suivant, le jeune roi fit son entrée solennelle à Paris ; il était vêtu d'une étoffe de soie semée de fleurs de lis d'or ; les principaux personnages de la ville étaient allés à sa rencontre jusqu'à La Chapelle Saint-Denis, et les édiles pour le recevoir avaient fait tapisser les rues ; des choeurs de musique étaient placés sur son parcours, de place en place, et des fontaines improvisées laissaient couler du lait, du vin, et des eaux de senteur. Sur des théâtres en plein vent, invention toute nouvelle, étaient représentés des Mystères. A ne considérer les choses qu'à leur point de vue superficiel, on eût pu croire que Paris était tout en joie, malheureusement cette joie de commande masquait un mécontentement général.

Quoi qu'il en soit, le nouveau roi fit ses prières à la cathédrale où il fut reçu par l'évêque et son clergé en grande cérémonie. Il se rendit ensuite au palais où il

Le jeune roi fit son entrée solennelle à Paris, en 1380,
au milieu des rues tapissées et ornées de fleurs.
reçut les présents de la ville et ceux des prélats et des seigneurs.

Pendant trois jours qu'il demeura au palais, ce fut une fête perpétuelle, accompagnée de joutes, de tournois, et de toute espèce de jeux militaires. Mais la fête terminée, il fallut en venir au sérieux ; l'impatience et les murmures du peuple allaient toujours croissant et ne permettaient guère au régent de se faire illusion sur les véritables sentiments du peuple, qui ne cessait de demander le retrait de l'impôt.

Aussi le prévôt des marchands prit-il l'initiative de convoquer nombre de personnes dans l'ancien Parloir aux Bourgeois, situé près du grand Châtelet, afin de s'entendre avec eux pour arriver à la satisfaction du voeu général. Le prévôt prenant la parole, expliqua qu'il comprenait parfaitement la légitime impatience de tous, cependant qu'il était convenable d'attendre que le nouveau roi en eût complètement terminé avec les cérémonies qui formaient la suite naturelle du sacre, pour mettre le régent en demeure de tenir la promesse qu'il avait faite. L'assemblée paraissait assez disposée à se ranger à cet avis, lorsqu'un cordonnier plus hardi que les autres, prit la parole et en termes très nets réfuta ce que venait de dire le prévôt :

— Ne pourrons-nous jamais jouir en repos de nos biens, dit-il ; l'avarice des grands continuera-t-elle toujours à nous charger d'impôts, impôts que nous ne devons point, que nous ne pouvons payer et qui excèdent nos revenus ? « Bourgeois de Paris, on vous repousse de l'assemblée des notables ; on ne veut pas que vous participiez aux délibérations et on vous demande arrogamment quel droit a la terre de se mêler avec le ciel et pourquoi la lie du peuple ose intervenir parmi les personnes riches. Pourquoi, adressons-nous des prières à Dieu ? Pourquoi nous dépouillons-nous de nos biens ! Pour des hommes qui en abusent ; nos biens servent à entretenir leur luxe, à payer leurs habits couverts d'or et de perles, à payer ces nombreux valets qui les suivent, à payer les frais des beaux palais qu'ils construisent. C'est pour ces vaines superfluités qu'il accablent d'impôts la capitale du royaume. La patience du peuple est poussée à bout. Je demande que les bourgeois prennent les armes ; ils doivent mourir plutôt que de souffrir plus longtemps une telle oppression. »

On juge si un pareil discours, prononcé devant des gens irrités, déjà contre ses gouvernants, mit le feu aux poudres. Instantanément il fut : acclamé et trois cents bourgeois s'armèrent et contraignirent le prévôt de les mener sur l'heure au palais, afin d'y adresser leurs remontrances au régent. Surpris par cette visite quelque peu tumultueuse, le duc-régent se résolut cependant à l'affronter, et accompagné du chancelier de France, l'évêque de Beauvais, il monta, ainsi que lui, sur la table de marbre du palais et demanda ce qu'on lui voulait.

Le prévôt prit la parole et exposa en termes très conciliants que le peuple ne demandait que l'exécution de la promesse qu'avait faite le duc, de retirer le dernier impôt créé par lui. Dans ce discours, le prévôt s'était attaché à ne rien dire qui pût blesser la susceptibilité du prince, tout en exprimant complètement la pensée populaire. Aussi le duc répondit-il qu'il ne pouvait rien prendre sur lui sans une délibération du conseil, mais que ce conseil allait être immédiatement assemblé, afin de prendre une décision qui, probablement, satisferait tout le monde.

— Retirez-vous paisiblement chacun chez vous, leur dit-il, demain vous pourrez peut-être obtenir ce que vous désirez. Les bourgeois s'en retournèrent en se promettant de revenir le lendemain.

Le conseil eut lieu, mais il ne fut pas d'avis qu'il y eût nécessité de rien accorder. Or, dans la soirée, quelques personnages qui devaient de l'argent aux juifs et se trouvaient dans l'impossibilité de s'acquitter, persuadèrent aux bourgeois que c'était eux qui en s'enrichissant, amenaient toujours la misère publique et qu'il fallait, après avoir obtenu le retrait de l'impôt, exiger du régent qu'il chassât les juifs du royaume. Cette nouvelle exigence, habilement colportée par des émissaires adroits, rencontra de nombreux approbateurs.

Le lendemain donc, les bourgeois se présentèrent à nouveau au palais. Le chancelier s'aperçut de suite des mauvaises dispositions de la députation et prit sur lui de lui donner une réponse tout à fait contraire au sens de la délibération prise par le conseil. — Le roi, leur dit-il, ne veut user envers vous que de bonté et de douceur ; c'est pour cela qu'il vous décharge présentement de tous impôts et de subsides, en vous remettant libéralement tous droits de péage, d'entrée, et de sortie et vous laissant la liberté de vendre et d'acheter sans rien payer, sous quelque prétexte que ce soit.

Ce fut alors que, satisfaits sur ce point, les bourgeois demandèrent l'expulsion des juifs. Le chancelier qui ne s'attendait pas à cette nouvelle prétention, se borna à répondre qu'il en parlerait au roi et que vraisemblablement, il serait fait selon leur désir.

Les bourgeois se retirèrent enchantés du chancelier et annoncèrent qu'ils avaient pleinement réussi, qu'une ordonnance allait paraître supprimant les impôts, mais comme le bruit se répandit aussi que les juifs allaient être chassés, ceux qui avaient excité le peuple contre eux n'attendirent pas davantage pour prétendre que toutes les promesses faites par le chancelier ne seraient pas tenues par le régent ; et dès l'aube, des pillards commencèrent par se répandre dans les maisons des receveurs publics, ils brisèrent les caisses, prirent l'argent qu'elles contenaient et en répandirent par les rues ; les tarifs et les registres furent déchirés ; puis, ce premier exploit accompli, ils se portèrent vers le quartier des juifs et pillèrent une quarantaine de maisons remplies de meubles précieux et de toute espèce de marchandises, de vaisselle d'argent, de pierreries et d'autres objets de valeur mis en gage par des emprunteurs.

Quelques-uns de ceux-ci profitèrent même de l'occasion pour retirer les promesses ou reconnaissances qu'ils avaient souscrites. Plusieurs de ces juifs furent massacrés chez eux, d'autres parvinrent à se sauver et à gagner le Châtelet, où ils demandèrent à être enfermés pour se trouver en sûreté. On leur enleva leurs enfants qu'on fit baptiser à Notre-Dame.

Le jeune roi, tout effrayé de ce désordre, exigea du régent qu'il prit des mesures pour que les juifs fussent rétablis dans leur demeure et on publia à son de trompe par les carrefours, qu'on eût à reporter sous peine de la vie, tout ce qu'on leur avait pris. Peu de gens s'empressèrent de le faire et les juifs s'estimèrent encore heureux de pouvoir rentrer en possession du peu qu'on leur avait laissé.

Sous le règne précédent, il avait été question d'assembler un concile général pour faire cesser un schisme qui s'était produit ; le clergé se plaignait des exactions que Clément VII et les cardinaux commettaient, l'Université de Paris qui comptait dans son sein plusieurs bénéficiers qui se trouvaient lésés, députa des docteurs au roi pour demander la réunion de ce concile.

Ce fut Jean Rousse du collège du Cardinal-Lemoine, qui fut chargé de porter la parole au nom de l'Université, mais le duc d'Anjou le fit arrêter dans la nuit et conduire au Châtelet, où il fut mis dans un cachot. La nouvelle de cette arrestation produisit une grande agitation dans le clergé et à l'Université, et le recteur alla trouver le régent pour lui demander la délivrance du prisonnier. Le duc refusa d'abord, mais l'agitation commençant à se répandre partout, il céda, et fit relâcher le prisonnier après avoir fait publier dans les écoles une défense formelle de soulever désormais la question de convocation d'un concile.

L'Université se tourna alors vers le prévôt de Paris, Hugues Aubriot, prétendant qu'il ne laissait passer aucune occasion de maltraiter les écoliers et tous les gens de l'Université et qu'il avait fait bâtir deux cachots qu'il appelait dérisoirement le Clos-Bruneau et la rue du Foin, signifiant par là que ces cachots devaient toujours être pleins d'écoliers. Elle le cita devant l'évêque de Paris. Celui-ci, qui ne demandait pas mieux que de sévir contre le représentant de l'autorité civile, le décréta d'accusation et informa contre lui. Hugues Aubriot crut d'abord qu'il lui suffirait de se mettre sous la protection du roi et sous celle du régent, pour se tirer de ce mauvais pas. Mais ceux-ci ne daignèrent pas le réclamer et le laissèrent aux mains de la justice de l'évêque, qui instruisit son procès. Le malheureux prévôt fut déclaré coupable d'infamie et d'impiétés punissables du feu.

Cette sentence allait être exécutée, lorsqu'à la sollicitation de quelques personnages marquants qui s'intéressaient à lui et ne doutaient pas de son innocence, les juges voulurent bien modérer la peine prononcée contre lui. Il fut conduit sur la place du parvis Notre-Dame, où étant monté sur un échafaud, il demanda à genoux et tête-nue, l'absolution de l'évêque avec promesse de satisfaire à tout ce qui lui serait imposé.

Le recteur et les docteurs de l'Université étaient présents, ainsi que le grand inquisiteur de la foi, qui fit publiquement la lecture des crimes et des impiétés dont on l'avait déclaré coupable. Après quoi, l'évêque revêtu de ses habits sacerdotaux, lui donna l'absolution et le condamna à la prison perpétuelle, et au jeûne, au pain et à l'eau. Ceci se passait au mois de mai 1381. Il fut incarcéré dans la prison de l'Evêché d'où il fut délivré l'année suivante par les Maillotins. Il eut pour successeur à la prévôté de Paris Audouin Chauveron, chevalier.

Le duc d'Anjou, depuis la suppression des impôts concédée par le chancelier, ne songeait qu'au moyen de les rétablir. Il avait tenu à ce sujet sept conseils différents avec les notables de la ville et les principaux membres du clergé, auxquels il avait représenté les pressants besoins du roi et de l'État. Il chargea Philippe de Villiers et Jean des Marets, avocat du roi au parlement, un vieillard de soixante-dix ans, très considéré par sa réputation d'honnête homme et qui jouissait d'un grand crédit sur le peuple, de faire comprendre aux bourgeois qu'il y avait nécessité absolue de rétablir ces impôts.

Jean des Marets accepta, espérant servir de médiateur entre la cour et les bourgeois et apaiser l'irritation de ceux-ci, mais il ne put rien obtenir, et il reporta au duc d'Anjou le peu de chance qu'il avait de voir jamais le peuple accepter des charges nouvelles. Le duc ne se tint pas pour battu ; et pour arriver à ses fins, il employa la ruse. Il avait été statué qu'aucune imposition ne pourrait être perçue, si elle n'avait été proclamée auparavant. Or, dans les circonstances actuelles cette proclamation était dangereuse et pouvait être le signal d'une véritable révolution. Il s'agissait de tourner la difficulté.

Un huissier s'en chargea moyennant le payement d'une bonne somme et voici ce qu'il imagina : Il se rendit aux halles, lieu ordinaire de ces sortes de proclamations, à cheval et tenant à la main droite un clairon. Il sonna une fanfare pour appeler les passants. Lorsqu'il y eut du monde autour de lui, il annonça que la vaisselle d'argent du roi venait d'être volée et promit une forte récompense à qui découvrirait les voleurs. Puis profitant de la surprise causée, par ses paroles, commentées entre tous ceux qui se trouvaient là, il ajouta vite :

— J'ai encore une autre communication à vous faire, demain on commencera à lever les subsides sur les denrées.

Et piquant des deux, notre homme se sauve à toute bride, laissant les gens tout ahuris par ce qu'ils viennent d'entendre. La proclamation était faite. C'était une étincelle sur une traînée de poudre. Dans tous les quartiers la nouvelle se

L'huissier se rendit à cheval aux
Halles lieu ordinaire des proclamations.
répandit que le duc d'Anjou voulait faire percevoir les taxes et elle excita la colère populaire.

Tout le long du jour des groupes se formèrent, la Maison aux Piliers ne désemplit pas, de sourdes rumeurs coururent la ville et le lendemain, ler mars 1382, les commis aux aides qui avaient reçu l'ordre de faire la recette, se présentèrent aux Halles. L'un d'eux s'approcha d'une vendeuse d'herbes et lui demanda un denier. La femme répondit par des injures et appela à l'aide ; en un instant le commis fut entouré, menacé, frappé et tomba assommé.

Ce fut le signal de la lutte. — Liberté ! aux armes ! cria-t-on partout, et les malheureux percepteurs furent tués et foulés aux pieds, on brisa les boîtes posées aux lieux ordinaires pour recevoir les deniers de l'impôt et une bande de gens coururent à l'église Saint-Jacques-l'Hôpital où s'était réfugié, disait-on, un des fermiers des aides qui s'étaient rendus adjudicataires de la ferme des nouveaux impôts. En vain quelques bourgeois observèrent timidement que l'église était lieu d'asile, on ne les écouta pas et la foule s'y précipita ; on trouva le fermier tremblant de peur, agenouillé au pied du grand autel, on s'empara de sa personne, on le traîna hors l'église et on le massacra.

Pendant ce temps, le peuple courait à l'Hôtel de Ville (Maison aux Piliers ou au Dauphin) pour y chercher des armes ; on savait que Charles V avait fait fabriquer des maillets de plomb qui avaient été déposés là comme dans un arsenal, on enfonça les portes et on s'empara des maillets, amie terrible qui devait donner son nom à l'insurrection qu'on appela les journées des Maillotins.

A l'un des angles de la place de l'Hôtel-de-Ville on voyait encore, avant' la révolution de 1848, la tourelle d'où un homme vêtu d'une longue robe noire, et le visage caché sous un capuchon rabattu, donna à la multitude furieuse le signal de la destruction, en frappant trois coups de maillet sur la muraille qui en avait longtemps gardé l'empreinte.

En sortant de l'Hôtel de Ville, la populace armée se porta à la prison de l'évêché où se trouvait détenu le prévôt Hugues Aubriot et lui rendit la liberté, en lui offrant de se mettre à sa tête, ce qu'il refusa prudemment et dans la nuit il partit pour Dijon, sa ville natale. Après cette première mise en liberté, les factieux ouvrirent les portes de toutes les prisons pour en tirer les criminels quels qu'ils fussent ; et sur le bruit qui se répandit que plusieurs fermiers et receveurs de l'impôt s'étaient réfugiés à l'abbaye de Saint-Germain-des-Prés, ils y coururent ; mais il n'était pas facile de pénétrer dans cette espèce de forteresse et les premiers qui tentèrent d'y entrer de vive force furent repoussés ; mais pour animer le zèle de ceux qui, spectateurs de la lutte, n'osaient pas encore y prendre part, un des meneurs s'écria que c'était dans l'abbaye que les juifs s'étaient retirés, en emportant tout leur or.

Il n'en fallut pas plus pour que de tous côtés arrivât du renfort aux assaillants. Chacun s'arma comme il put, et on parvint à enfoncer les portes. Après avoir massacré quelques serviteurs de l'abbaye et pillé les objets les plus précieux qu'ils purent découvrir, les envahisseurs se retirèrent et se portèrent vers la rue des Juifs, qui était alors à peu près exclusivement habitée par des Israélites. Ceux qui purent se sauver se hâtèrent de fuir ; quant aux autres, ils furent fort maltraités, et, pendant trois ou quatre jours, leurs maisons furent livrées au pillage.

Enhardis par le succès, les émeutiers, dont le nombre grossissait toujours, continuèrent à se porter à tous les excès, et ils résolurent d'aller rompre le pont de Charenton, afin d'empêcher les troupes royales de pénétrer dans Paris ; mais la crainte de s'éloigner du centre de la ville où ils se trouvaient soutenus, les empêcha d'exécuter ce projet, et ils se contentèrent de se répandre dans les divers quartiers et de continuer la chasse aux juifs.

Pendant ce temps, les bourgeois, qui les premiers avaient applaudi à la résistance contre l'impôt, commencèrent à s'effrayer des conséquences que les excès commis pouvaient amener et tentèrent d'enrayer le mouvement.
Les officiers de ville, dixeniers et soixanteniers, firent armer dix mille bourgeois qui se chargèrent de faire le guet et d'empêcher que de nouvelles violences contre les personnes ou les propriétés fussent exercées.

On eut recours aussi à l'avocat Jean des Marets, dont on connaissait l'influence sur le peuple et l'esprit de modération, et on le pria de vouloir bien expliquer aux plus mutins que ce n'était pas par le pillage et le meurtre qu'on obtenait de faire triompher une cause à laquelle devaient s'associer tous les gens de bien. Il sut être assez éloquent pour faire comprendre qu'après avoir fait acte de protestation contre l'indigne conduite du duc d'Anjou, il fallait absolument en rester là et ne pas pousser plus loin une agitation dangereuse ; et un calme relatif succéda aux scènes tumultueuses de la journée.

D'un autre côté, les bourgeois avaient député quelques docteurs de l'Université auprès du jeune roi qui était à Vincennes, pour le supplier de ne pas les croire coupables des faits regrettables qui avaient eu lieu et de ne pas leur imputer les emportements d'une populace en délire, dont ils désavouaient les actes répréhensibles.

Le roi accueillit favorablement les députés et sur leur prière, il accorda une amnistie complète pour tout ce qui s'était passé. Étaient cependant exceptés de ses effets ceux qui avaient forcé les prisons du Châtelet. Jean des Marets publia lui-même cette bonne nouvelle par les rues où il se fit porter en litière, en raison de ses infirmités qui ne lui permettaient pas de marcher et il prêcha de nouveau le calme et la concorde. Mais l'exception faite pour ceux qui avaient forcé les prisons fut assez mal accueillie : on connaissait l'esprit rusé du duc d'Anjou et on craignait qu'on usât de ce moyen pour envoyer à la potence tous ceux qu'on voudrait punir, sous prétexte qu'ils avaient participé au bris de portes des prisons.

Cette appréhension devint très vive, lorsqu'on vit le prévôt de Paris faire arrêter nombre de gens et ordonner qu'ils soient pendus. La colère populaire se réveilla et on se disposa à s'opposer aux exécutions. Alors le duc d'Anjou qui avait toujours un expédient tout prêt pour tourner les difficultés, donna l'ordre à son prévôt de ne pas exciter inutilement le peuple par la vue des exécutions capitales et de se contenter de se défaire secrètement des coupables en les faisant jeter à la Seine, par petit nombre à la fois, de façon à ne pas éveiller l'attention ; ce qui fut fait.

Le roi était toujours à Vincennes et la disposition dans laquelle se trouvaient les Parisiens lui faisait redouter de rentrer à Paris ; cependant, après avoir successivement visité Compiègne, Meaux et Pontoise, il se décida, sur l'avis de quelques-uns de ses conseillers, de revenir dans sa capitale, afin de calmer les esprits par sa présence, mais il posa au préalable certaines conditions ; entre autres, il demanda que les habitants consentissent à payer les droits de gabelle et de douane, les exemptant d'autres impôts. Ceux-ci refusèrent.

Le duc d'Anjou était d'avis qu'il fallait employer la force et que c'était le seul moyen propre à amener la soumission de tous ; le roi le laissa maître d'agir. En conséquence, il ramassa tout ce qu'il put de troupes et les envoya dans les environs de Paris, avec pouvoir d'y vivre à discrétion, de voler, de piller et de commettre toute espèce d'actes d'hostilité hormis le meurtre et l'incendie, de façon à terroriser les Parisiens et les amener à capituler. Ce moyen excessif, mais peu délicat, produisit l'effet attendu. La famine commençait à se faire sentir ; on parla d'accommodement.

Une conférence eut lieu à Saint-Denis ; Arnaud de Corbie, premier président, y parla au nom du roi et Jean des Marets en celui de la ville de Paris. Plusieurs autres personnages y assistèrent ; entre autres l'évêque de Paris, l'abbé de Saint-Denis et Pierre de Villiers. On convint que le roi pardonnerait tout ce qui s'était passé et que la ville lui ferait un présent de cent mille francs. C'était toujours la fin de ces sortes d'arrangements. D ès le lendemain, le roi fit son entrée dans sa bonne ville, au bruit des acclamations du peuple, le duc d'Anjou dont la présence était odieuse aux Parisiens, partit pour l'Italie et ce fut le duc de Bourgogne qui le remplaça dans le gouvernement.

Quelques mois se passèrent assez tranquillement. Mais le comte de Flandre se trouvant opprimé par ses sujets révoltés, appela à son aide le roi de France qui convoqua son conseil, et une expédition fut résolue en faveur du comte.

Le 18 août, le roi alla prendre en grande pompe l'oriflamme à Saint-Denis ; on mit les troupes sur pied, on organisa tout ce qu'il fallait pour combattre et à la fin d'octobre, le roi passa à Arras une revue de son armée et entreprit la campagne.

Or tandis que Charles VI se préparait à gagner la victoire de Rosbec, les mécontents de Paris, qui se désignaient eux-mêmes sous le nom de Maillotins, depuis la journée du Ier mars, proposèrent un nouveau soulèvement. Il s'agissait cette fois de s'emparer du château du Louvre, de celui de Beauté-sur-Marne, près Vincennes, qui était une des résidences habituelles du roi, et de la Bastille, et de raser le tout.

Ce projet exista-t-il réellement parmi les chefs maillotins, il est permis d'en douter, car à cette époque une pareille révolution ne pouvait être tentée qu'au profit de quelqu'un, et les Parisiens n'avaient aucun roi à mettre à la place de Charles VI, et tout porte à croire qu'il était l'oeuvre du duc d'Anjou qui, fomentait la discorde pour se venger des Parisiens dont il n'avait pu vaincre l'opiniâtreté, au sujet des impôts, et qui fit présenter ce plan par ses agents.

Son but secret était de rendre nationale une guerre en Italie qu'il eût entreprise, dans son intérêt particulier, et d'empêcher celle dans laquelle le duc de Bourgogne avait entraîné le roi en ameutant les Parisiens et forçant Charles VI, à revenir. De cette façon, il faisait coup double, en se vengeant à la fois du duc et des Parisiens. Quoi qu'il en soit, lorsque le roi apprit que l'esprit de sédition relevait la tête dans sa capitale, il en fut vivement contrarié. Le mouvement avait été cependant enrayé par le conseil d'un bourgeois nommé Nicolas Flamand qui, tout en désirant qu'il réussît, n'en approuvait pas l'opportunité.

« — Attendez, avait-il dit, que ceux de Gand viennent à leur entente, ainsi qu'on l'espère bien, a donc, sera-t-il l'heure de ce faire. Ne commençons pas chose dont nous nous puissions repentir. »

Charles VI, au lieu de faire le siège de Gand, songea donc à revenir au plus vite à Paris, mais il était assez embarrassé de savoir comment il devait se présenter

Le roi Charles VI, entrant dans Paris comme dans une ville
conquise, donna l'ordre d'enfoncer les portes.
aux Parisiens, qui n'étaient ni soumis, ni rebelles.

Pour sonder leurs dispositions, le connétable, l'amiral, les seigneurs d'Albret, de Couci et de La Trémoille, envoyèrent des émissaires, sous prétexte de faire préparer leurs hôtels et de marquer les logements des troupes.

Le roi était arrivé â Saint-Denis. Vingt mille bourgeois armés de pied en cap, allèrent à sa rencontre. Les officiers du roi se demandèrent si c'était pour combattre que se présentait ainsi cette force armée. — Voici l'orgueilleuse ribaudaille, disaient les seigneurs, plus orgueilleux encore. S'ils fussent venus servir le roi, au point où ils sont, quand il alla en Flandre, ils eussent bien fait ; mais ils n'en avaient pas la tête enflée, fors que de dire et prier à Dieu que jamais pied d'entre nous n'en retournât.

Dans l'incertitude où l'on était, s'il ne faudrait pas en venir aux mains, le connétable, l'amiral et les seigneurs envoyèrent demander des sauf-conduits pour conférer. — Des sauf-conduits ! répondirent les Parisiens ; qu'ils viennent sans crainte, sur notre parole, ils seront bien reçus. Nous ne sommes ici en armes que pour montrer au roi les forces de la ville de Paris, afin qu'il puisse s'en servir dans le besoin, disposés que nous sommes à lui obéir.

Tout ceci n'empêcha pas que le 11 janvier 1383, l'armée royale fut divisée en trois corps, au milieu desquels le roi marcha seul à cheval, en affectant une contenance fière et menaçante.

Le prévôt des marchands, les échevins, les députés des divers corps de la ville réunis à La Chapelle-Saint-Denis, se présentèrent devant le monarque pour déposer respectueusement leurs hommages à ses pieds et lui offrir selon l'usage les clefs de la ville et les présents accoutumés.

Ces magistrats eurent la douleur et l'humiliation de voir leurs offrandes rejetées avec mépris ; les clefs furent refusées, et le roi entrant dans Paris comme dans une ville conquise, donna l'ordre de briser les barrières et d'enfoncer les portes. Il marcha avec la même fierté jusqu'à Notre-Dame où, après quelques prières, il offrit un étendard semé de fleurs de lis d'or, qu'on exposa devant l'image de la Vierge, après quoi, il alla loger au palais.

Le connétable, les deux maréchaux de France et les principaux officiers de l'armée, se rendirent aussitôt sur les principales places où le peuple avait coutume de s'assembler et y installèrent des corps de garde. On logea les soldats chez les habitants, avec défense sous peine de mort, d'outrager personne, de voler ou de commettre la moindre violence. Le connétable fit pendre aux fenêtres, deux soldats qui avaient contrevenu à cet ordre. Puis on commença à arrêter trois cents riches bourgeois, accusés d'avoir pris part aux désordres des Maillotins et on les traîna en prison ; parmi eux se trouvaient Guillaume de Sens, Jean Filleul, Jacques du Chastel, Martin Double, avocat, Jean le Flamand, Jean Noble et Jean de Vaudetat.

Les arrestations jetèrent la consternation dans Paris ; chacun craignait pour soi et pour les siens et on se demanda avec terreur, ce que signifiaient ces mesures violentes ; mais cette terreur augmenta encore, lorsqu'on vit deux des prisonniers extraits de leur prison et conduits sur la place pour y être mis à mort. L'un était orfèvre, l'autre drapier. La femme du premier, qui était enceinte, folle de désespoir, se précipita par une fenêtre dans la rue et se tua.

Cinq jours après, le roi fit transporter à Vincennes les chaînes dont on se servait pour barrer les rues le soir et ordonna à tous les habitants, sous peine de mort, de déposer leurs armes au palais ou au château du Louvre. Il s'en trouva une quantité suffisante, dit-on, pour armer cent mille hommes. Il fut résolu aussi d'abattre l'ancienne porte Saint-Antoine, d'achever la Bastille commencée sous le règne précédent et d'élever une nouvelle tour à côté du Louvre, de l'environner d'un fossé où l'on ferait venir l'eau de la Seine, de façon à se rendre maître des deux principales entrées de Paris.

La duchesse d'Orléans qui venait d'arriver dans cette ville, fit de vains efforts pour apaiser la colère du roi ; de son côté, l'Université délégua son recteur et deux de ses plus renommés professeurs pour implorer sa clémence par une harangue que le recteur lui adressa dans les termes les plus respectueux et les plus pathétiques. Le jeune monarque était sur le point de fléchir, mais le duc de Berry, son oncle, qui prit la parole pour lui, répondit que le roi ferait en sorte qu'on ne confondît pas les innocents avec les coupables, mais qu'il fallait faire un exemple par la punition des auteurs des désordres passés.

Ce fut ainsi que Nicolas le Flamand, noté pour avoir assisté au meurtre des deux maréchaux, commis en la présence du dauphin sous le roi Jean, eut la tête tranchée. Cette exécution fit une telle impression sur l'esprit des prisonniers, que quelques-uns se tuèrent eux-mêmes, pour éviter l'ignominie du supplice. On l'épargna à d'autres, que l'on jeta de nuit dans la Seine, ou que l'on fit mourir secrètement. Plus de cent personnes furent ainsi envoyées à la mort.

Une des dernières et des plus nobles victimes, fut Jean des Marets, l'avocat estimé, le vénérable vieillard qui avait acquis une grande réputation de talent et d'honnêteté, qui avait occupé de hauts emplois sous les trois règnes précédents et qui avait mérité par ses services d'être anobli, lui et sa famille, par le roi Charles V en 1365 ; il fut condamné à mort pour être resté à Paris pendant les troubles et avoir tenté d'arrêter la fureur populaire, en conseillant la soumission aux lois.

Compris dans la sentence de mort prononcée contre douze bourgeois, déclarés coupables du crime de lèse-majesté, il fut placé sur le haut de la charrette qui conduisait les condamnés au supplice, afin qu'étant plus en évidence, il éprouvât plus de confusion. En se voyant confondu avec des gens qui avaient volé et pillé, il prononça sur le parcours de l'échafaud ces paroles du psalmiste : Jugez-moi, Seigneur, et séparez ma cause de celle d'une nation perverse. Lorsqu'il fut monté sur l'échafaud, celui qui présidait à l'exécution lui dit : — Maître Jean, criez merci au roi, afin qu'il vous pardonne.

Il répondit :

— J'ai servi au roi Philippe, son grand aïeul, au roi Jean, et au roi Charles, son père, bien et loyalement ; jamais ces trois rois ne me surent que demander, ainsi ferait celui-ci s'il avait âge et connaissance d'homme. A Dieu seul veux crier merci.

On lui trancha la tête.

Son corps gardé secrètement pendant vingt-quatre ans, fut inhumé honorablement dans l'église Sainte-Catherine-du-Val-des-Ecoliers. La vengeance du conseil royal ne se borna pas à ces exécutions.

Le 27 janvier, des lettres patentes supprimèrent la prévôté des marchands, l'échevinage, le greffe de cette prévôté, sa juridiction, et le roi s'empara des rentes et deniers communs de la ville. L'exercice de la juridiction qui appartenait à l'Hôtel de Ville, fut transporté au prévôt de Paris ou à son lieutenant.

Toutes les maîtrises et communautés des métiers furent abolies. Défense fut faite à aucune assemblée de métier de se tenir sous forme de confrérie ou autrement, sans la permission du roi ou de son prévôt, « si ce n'est pour aller à l'église et en revenir ». Tous dixeniers, cinquanteniers et quarteniers, furent abolis. Toutes congrégations furent supprimées.

Bref, le mois de février se passa en publications de nouvelles marques de sévérité. Les Parisiens furent désormais privés de tous moyens de défense, dépouillés de leurs droits et privilèges, réduits à la condition de mineurs, et durent s'estimer heureux, ceux qui ne furent pas condamnés au moins à l'amende ou au bannissement. Lorsque pleine et entière satisfaction eût été donnée de la sorte au roi et à son conseil, on put facilement se montrer clément. Il n'y avait plus personne à punir !

Charles VI fit assembler le peuple dans la cour du palais, où l'on dressa sur le grand escalier un échafaud orné de tapisseries en manière de théâtre. Un trône y avait été préparé. Le roi y prit place entouré des princes, ses oncles, et des

Pour se défaire des coupables, on les fit jeter
discrètement, la nuit, dans la Seine.
personnages composant sa cour. Alors les femmes des bourgeois qui étaient encore emprisonnés « accoururent aussitôt tout échevelées et avec de méchants habits. » Elles levèrent les mains vers le roi et, les yeux baignés de larmes, elles jetaient des cris pitoyables pour le supplier d'avoir pitié de leurs maris et de leurs familles. Le roi garda le silence.

Alors le chancelier Pierre d'Orgemont prit la parole et dans un discours énergique et passionné, il reprocha avec véhémence au peuple ses insolences, ses cruautés, ses révoltes et les attentats qu'il avait commis contre l'autorité et la majesté royale, depuis le meurtre des deux maréchaux Robert de Clermont et Jean de Conflans, jusqu'aux dernières séditions. En écoutant ces paroles, les assistants consternés se demandèrent quel nouveau coup de foudre allait tomber sur eux, et la peur se lisait sur tous les visages.

Soudain les ducs de Berry et de Bourgogne se jetèrent aux pieds du roi et le supplièrent de pardonner au reste des coupables. Aussitôt les femmes, les demoiselles et les jeunes filles du peuple se mirent à sangloter. Le peuple tomba à genoux et cria :

— Miséricorde !

Alors le chancelier se tournant vers l'assistance, lui annonça que ses prières étaient exaucées et termina en disant :

— Remerciez tous le roi, notre sire, de ce qu'au lieu d'employer la juste sévérité que vous avez encourue, il préfère user de douceur et de clémence.

On relâcha les prisonniers, mais ce ne fut pas sans qu'il leur en coutât gros, car il leur fallut payer comptant une amende qui équivalait à la perte de leurs biens. Semblable exaction fut faite sur tous les bourgeois qui avaient été centeniers, soixanteniers, cinquanteniers ou dixeniers pendant la sédition.

Tout cela n'empêcha pas le but que s'était toujours proposé d'atteindre le roi : le rétablissement des impôts. On fit tranquillement la publication du péage, des gabelles, d'une taxe de douze deniers pour livre sur toutes les marchandises qui se vendaient, du quatrième du vin débité en détail et de douze sous d'augmentation pour chaque muid. Tant de levées d'amendes et d'impositions eussent dû jeter des sommes considérables dans les coffres du roi, mais la plus grande partie de tout cet argent fut la proie des gens de la cour, des officiers de l'armée et des financiers.

Deux années se passèrent sans amener aucun événement important.

En 1385, il y eut un duel qui fit du bruit à Paris : le roi d'Angleterre avait promis une forte récompense à quiconque soutiendrait en France en champ clos, contre le meilleur chevalier du royaume, que la nation anglaise surpassait la française en valeur et en chevalerie. Pierre de Courtenay se chargea de ce soin et vint à Paris défier Gui de la Trémouille.

Le roi et ses conseillers insistèrent auprès de Pierre de Courtenay pour lui faire abandonner son dessein, mais il ne voulut pas y consentir et la Trémouille, craignant d'être mal jugé, s'il ne s'empressait de se mettre à la disposition de son adversaire, pria lui-même le roi de permettre le duel, qui eut lieu derrière les murs de Saint-Martin-des-Champs.

Les astrologues qui jouissaient alors d'un grand crédit, assurèrent au roi que le combat serait favorable au champion de la France et qu'il aurait lieu par un temps magnifique. Ce qui n'empêcha pas qu'au jour fixé, il tomba tant de pluie, que lorsque les deux combattants baissèrent leur lance pour courir l'un contre l'autre, ils furent séparés par ordre du roi et des princes, ses oncles. L'affaire en resta là.

 


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