Histoire de Paris
Cette rubrique vous livre l'histoire de Paris et de ses arrondissements. Origine, évolution, de la capitale de la France. Pour mieux comprendre la physionomie du Paris d'aujourd'hui, plongez-vous dans les secrets de son passée.
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HISTOIRE DE PARIS
(D'après Paris à travers les âges, histoire nationale de Paris et des Parisiens depuis la fondation de Lutèce jusqu'à nos jours, paru en 1879)

Philippe VI de Valois. — Pierre Remy, trésorier. — Saint-Sépulcre. — Le pilori des Halles. — Les ménétriers. — L'école de santé. — Mahaut d'Artois et Robert d'Artois. — Nouveaux établissements publics. — Le supplice de Malestroit. — Les jouteurs. — Châtiment des blasphémateurs. — La peste noire. — L'Hôtel Dieu. — Cinq cents morts par jour. — Le convoi royal. — La guerre et les modes.

On voit que se multipliaient les établissements destinés à favoriser l'instruction, et, depuis la fin du XIe siècle où les écoliers, étendus sur la paille fraîche qui jonchait le cloître Notre-Dame pour y suivre les cours et où ceux qui étaient pauvres mendiaient leur pain de porte en porte et couchaient en plein air, enveloppés dans leurs manteaux, et grelottant de froid quand ils n'avaient pas de manteau, nombre de gens s'étaient déclarés leurs protecteurs, et ils n'en étaient plus réduits, depuis que les chanoines de Notre-Dame avaient expulsé de leur cloître les écoles épiscopales, à aller lire le missel public, enchaîné derrière un treillis de fer à la porte des églises.

Ces chanoines furent l'objet d'une ordonnance chapitrale de 1334, qui fit défense à aucune femme, jeune ou vieille, chambrière ou parente d'un chanoine, de demeurer dans le cloître, « parce que ce lieu est saint, dédié et consacré à Dieu ».

En 1336, Paris fut attristé par un incendie considérable qui détruisit toutes les logettes des marchands de la foire dite du Landit.

Mais arrivons enfin à la période guerrière qui signala les dix dernières années du règne de Philippe VI qui, dès 1339, était occupé à soutenir une lutte que lui avait suscitée Robert d'Artois et il dut faire la guerre en Bretagne pour soutenir l'arrêt d'investiture du duché, donné en faveur de Charles de Chastillon contre Jean de Bretagne, dit de Montfort. Il lui fallut alors avoir recours à la ville de Paris pour qu'elle l'assistât d'hommes d'armes.

En 1339, les Parisiens lui offrirent 800 hommes à cheval, entretenus pour quarante jours, à raison de six sous parisis chacun ; le roi accepta l'offre et voulut que tous les habitants contribuassent à la solde de ces 800 hommes, même ceux qui demeuraient dans la juridiction des chapitres, monastères, etc ; il n'en excepta que les gens de son hôtel, ceux des hôtels de la reine et du duc de Normandie (en 1343 la ville offrit encore 500 hommes et le prévôt des marchands et échevins leva une imposition sur le vin et les grains pour leur entretien. En 1547, Paris fournit jusqu'à 1500 chevaux au roi.)

Tandis que Philippe VI était aux prises avec Edouard et que les Français perdaient la funeste bataille de l'Ecluse, le mariage de Philippe, son second fils, avec Blanche, fille de Charles le Bel, se préparait et un tournoi fut célébré à cette occasion au mois de janvier 1344 ; et les chroniqueurs s'accordent pour louer cette fête magnifique, à laquelle assistèrent les plus illustres chevaliers de France et de l'étranger.

Quelques-uns cependant y trouvèrent un dénouement qu'ils ne soupçonnaient pas, ce furent Olivier de Clisson, le baron d'Avangour, Geoffroi et Georges de

Cloître de l'église Saint-Séverin, commencé en 1347.
Malestroit et d'autres chevaliers bretons qui, à l'issue de la cérémonie, furent appréhendés au corps et conduits sous bonne escorte dans les prisons du Châtelet, accusés de conspirer avec le roi d'Angleterre contre Philippe de Valois. Or, à cette époque, les accusations de ce genre étaient vite converties en condamnations.

Olivier de Clisson ne sortit du Châtelet que pour monter sur l'échafaud qui avait été dressé aux halles ; il y fut traîné dans une charrette, puis arrivé sur le lieu de l'exécution, on le fit descendre de la charrette pour lui bander les yeux, on le fit mettre à genoux, la tête appuyée sur un billot en bois.

Le bourreau lui abattit la tête avec une épée à feuille ; elle fut portée à Nantes, et exposée sur les murs de la ville ; quant au corps, il fut accroché au gibet de Montfaucon. « La veille de Saint-André, furent traînés honteusement au même échafaud des halles Geoffroi de Malestroit, chevalier, et son fils avec quatre autres chevaliers et quatre écuyers bretons. Après qu'on leur eût coupé la tête, on pendit les corps au gibet, et le samedi saint suivant on fit le même traitement aux seigneurs de la Roche-Tessart et de Perey. »

Par la suite, on s'aperçut qu'on avait oublié le frère de Geoffroi de Matestroit, Henri, qui était clerc et docteur en droit et maître des requêtes de l'hôtel du roi. On se hâta de le livrer au bourreau dépouillé « en sa jacquette » sans chaperon, on lui mit les fers aux pieds et aux mains, et en cet état, on le hissa dans un tombereau à plâtre, de façon que tout le monde pût aisément le voir et on le mena depuis la porte Saint-Jacques jusqu'au Temple où il fut emprisonné.

Le prévôt de Paris, Guillaume de Gourmont l'avait escorté avec une multitude de gens armés, mais l'ingérence du prévôt dans l'affaire froissa Foulques de Chanac, l'évêque de Paris, qui prétendait que l'accusé étant ecclésiastique lui appartenait et le réclama. Le roi et son conseil firent d'abord la sourde oreille, mais enfin, ils se décidèrent à le livrer à l'évêque afin qu'il le dégradât et le rendit ensuite au prévôt pour être puni comme traître au roi. Il fut fait ainsi ; Henri de Malestroit fut transféré dans la prison de l'évêque, mais alors on ne fut pas d'accord sur le genre de dégradation à lui infliger et voici ce à quoi on s'arrêta.

On fit de nouveau monter le patient dans son tombereau et après l'avoir fait passer sur le pont Notre-Dame, on le promena dans les divers carrefours de Paris, où, à son de trompe, un héraut invitait le peuple à venir entendre sa condamnation. C'était à qui se presserait pour mieux le voir et prêter l'oreille.
Au retour, on le força à monter au haut d'une échelle qui fut élevée sur le parvis Notre-Dame et là le peuple lui jeta des oeufs et de la boue. Il fallait voir l'empressement que chacun mettait à se distinguer dans cet exercice : les quolibets ne manquaient pas et chaque fois qu'un oeuf venait se briser sur la face du condamné, c'était des éclats de rire et des joyeusetés à n'en plus finir. Il fallut cependant cesser cet amusement au bout de quelques heures.

Henri de Malestroit fut réintégré dans sa prison pour y passer la nuit et dès le lendemain on recommença la promenade aux carrefours et l'exhibition sur l'échelle ; mais cette fois, non content d'exciter le populaire à ne pas manquer de venir prendre part à la fête, l'autorité avait pris la précaution de faire amener sur la place du parvis des tombereaux chargés d'ordures, « le patient en fut si couvert qu'il n'était plus reconnaissable » dit l'historien Felibien. On le ramena encore dans la prison épiscopale, où il devait rester enfermé jusqu'à la fin de ses jours. Au bout de neuf semaines il était mort. Alors on le promena sans vie dans les rues et les carrefours, puis on le porta à l'Hôtel-Dieu, où on l'enterra.

Tout cela n'avait pas empêché que le lendemain du mariage du prince il y eut de superbes joutes dans le jardin du palais ; parmi les jouteurs était le duc de Normandie, contre qui, par ordre du roi, jouta le seigneur de Saint-Venant, un robuste compagnon, qui, d'un seul coup, renversa à terre le duc et son cheval.

Le comte d'Eu, connétable de France, jouta aussi et reçut un coup de lance qui lui brisa la poitrine ; il mourut dans la nuit.

Ces jeux barbares étaient alors grandement en honneur, et il était rare qu'il ne s'y produisît pas quelque accident de ce genre, et la liste est longue de tous ceux qui perdirent la vie en joutant et en tournoyant. Aussi, les papes ne cessèrent-ils de les interdire, et plusieurs rois de France les imitèrent.

Philippe le Bel les avait proscrits en 1342 ; Philippe le Long les défendit en 1348, mais nous voyons que Philippe de Valois les rétablit ; il fallut qu'Henri II y fût tué pour qu'on se décidât à les supprimer, et encore ils ne le furent qu'en 1560, après que Henri de Bourbon-Montpensier en fut aussi victime.

Pendant qu'on jouait ainsi à Paris sa vie pour le plaisir, Edouard III, après avoir ravagé la Basse-Normandie, mettait à feu et à sang Louviers, Pont-de-l'Arche, Vernon, Mantes et Meulan, et marchait sur la capitale. Philippe alla à sa rencontre en côtoyant la rive droite de la Seine. Lorsque Edouard arriva avec ses troupes à Poissy, en toute hâte le roi de France se replia sur Saint-Denis pour couvrir la capitale.

Il était temps ! car déjà les détachements anglais pillaient et brûlaient Saint-Germain, Nanterre, Rueil, Saint-Cloud et Neuilly. « Paris s'était hérissé de défenses, dit l'auteur des Sièges de Paris. On avait commencé à démolir dans les environs un certain nombre de maisons qui gênaient les travaux militaires ou dont les matériaux étaient nécessaires pour construire les fortifications. Les propriétaires ameutèrent le peuple, et leur opposition obligea de suspendre cette destruction dont les événements démontrèrent l'inutilité. » En effet, Edouard s'arrêta devant l'attitude des Parisiens et battit en retraite.

Quelques jours après la funeste bataille de Crécy, il eût pu revenir sur ses pas ; il eût trouvé Paris atterré et bien peu en état de se défendre ! Il ne vint pas mettre le siège devant la capitale, mais il alla prendre Calais, conclut une trêve de dix mois, le 28 septembre 1347, et retourna en Angleterre.

Philippe s'occupa alors d'édicter une loi contre les blasphémateurs. Déjà le concile de Sens, réuni à Paris pendant le carême de 1346, avait prescrit à chaque Parisien de dire trois fois l'Ave maria à l'heure du couvre-feu, pour la prospérité de l'église, la paix du royaume et la famille royale (le couvre-feu se sonnait alors vers sept heures du soir).

Philippe punit les blasphémateurs de la peine du pilori avec la prison et le jeûne au pain et à l'eau pendant un mois. L'ordonnance porte : « Si le coupable retombe dans la même faute, on lui coupera la lèvre supérieure avec un fez chaud en sorte qu'on lui voie les dents ; à la troisième fois qu'il aura blasphémé, la lèvre inférieure lui sera coupée, et s'il continue encore on lui coupera la langue, afin qu'il n'ait plus le moyen d'en abuser contre l'honneur de Dieu ».

Les Parisiens ne jouirent guère de la détente apportée dans les esprits par la trêve, car un fléau épouvantable s'était abattu sur la France, ravageant les villes et les hameaux, les palais et les chaumières.

C'était la peste noire ! La peste noire qui fit mourir à Paris 80,000 personnes ! Le mal commençait par une tumeur sous les aisselles ou dans l'aine, et emportait ceux qui en étaient atteints dans le court espace de deux ou trois jours. Cette peste, apportée d'Égypte et de Syrie, envahit d'abord la Sicile, la Toscane et la Provence en novembre 1347. Un moment arrêtée par le froid, l'épidémie reprit au printemps avec une énergie épouvantable. Avignon, Narbonne, Montpellier, furent presque entièrement dépeuplés.

Bientôt, s'avançant de ville en ville, la contagion atteignit Paris. On n'avait jamais entendu, jamais vu, jamais lu que dans les temps passés une telle multitude de gens eussent péri. (La peste noire dura quatre ans et fit périr en Europe vingt-cinq millions de personnes.)

Paris était dans la consternation, cinq cents personnes mouraient quotidiennement à l'Hôtel-Dieu et les soeurs vouées au service des malades redoublèrent de zèle à cette occasion, aux dépens de leur propre existence, car elles moururent en si grand nombre qu'il fallut à plusieurs reprises renouveler la communauté.

Cet hôpital avait reçu de Philippe de Valois au mois de janvier 1329, la donation de cent charretées de bois à prendre annuellement dans la forêt de Bièvre et, par lettre du 22 février 1339, le roi avait accordé à Raoul du Bois, prieur, le droit de pouvoir acquérir par les aumônes des fidèles cent livres de rente pour achat de la toile nécessaire à l'ensevelissement des morts ; mais la grande quantité de mourants ne permettait pas qu'on les ensevelît, et on se contentait d'en charger des tombereaux qui allaient verser les cadavres au cimetière des Innocent La place manqua vite, le cimetière fut fermé (et ne rouvrit qu'en 1351), et on en bénit vite un nouveau hors des murs de la ville.

Inutile d'ajouter que pendant plus d'une année que dura l'épidémie à Paris, les processions, les promenades de reliques et de châsses ne cessèrent pas, plus que les prières publiques dans toutes les églises, mais la colère céleste ne fléchissait pas et frappait aussi bien les têtes couronnées que celles des humbles mendiants. La reine Jeanne de Bourgogne mourut, la duchesse de Normandie, femme du fils aîné du roi, mourut, l'évêque de Paris, Foulques de Chanac, mourut. C'était un deuil général dans la ville. Deuil qu'augmenta bientôt la famine, suivante ordinaire de toute épidémie. Les campagnes ravagées manquèrent de bras et la récolte manqua. Alors, les visages pâles et livides des malheur yeux affamés apparurent dans les carrefours et nombre de ceux que la peste avait épargnés mouraient dans les affreuses tortures de la faim.

Pendant ce temps, des reprises d'hostilités contre l'Angleterre alternèrent avec des trêves sans cesse rompues, et cet état de lutte permanente exigeait des dépenses que le roi ne pouvait faire qu'en levant de nouveaux impôts ; ce fut ainsi qu'en 1350, Paris lui accorda pour une année la levée de certaines impositions sur toutes les marchandises et denrées qui seraient vendues dans la capitale et ses faubourgs.

Il ne put en percevoir l'entier produit, la mort le frappa le 22 août 1350, à l'âge de 57 ans. Son coeur fut porté à Bourg-Fontaine en Valois et ses entrailles aux Jacobins de Paris. Il était dit que la guerre le poursuivrait même après son trépas.

Dans la marche de son convoi, il s'éleva une dispute de préséance entre les chanoines de la cathédrale et les membres de l'Université. La querelle s'échauffa, et laissant le corps du roi prendre les devants, chanoines et docteurs en vinrent aux mains, et ce furent les recteurs de l'Université et « ses suppôts » qui eurent le dessous ; ils reçurent plus de coups qu'ils n'en donnèrent, aussi se plaignirent-ils amèrement au roi Jean, fils et successeur de Philippe, qui nomma trois arbitres pour étudier l'affaire.

En 1347, le pape accorda des indulgences pour faciliter la reconstruction de l'église Saint Séverin, et on y exécuta des travaux importants, ce-pendant elle fut encore agrandie en 1489, et, le 12 mai de cette année, on posa la première pierre de l'aile droite et des chapelles qui sont derrière le sanctuaire, mais il reste de la reconstruction de 1347 le portail latéral et le porche ménagés sous la tour, la partie inférieure de la façade, les voûtes des trois premières travées du premier collatéral de droite, les trois premières travées de la grande nef, le triforium des quatre premières travées, la tour et le second collatéral de la nef à droite.

Ce fut de 1489 à 1498 que le choeur fut reconstruit dans de vastes proportions. L'église a la forme d'un parallélogramme à une nef et deux collatéraux qui font le tour d'un vaste choeur polygonal, et sont eux-mêmes enveloppés par une ceinture de chapelles carrées sans transept.

La façade offre un aspect assez irrégulier ; le portail, d'un fort beau style, appartenait autrefois à l'église Saint-Pierre-aux-Boeufs, de la rue d'Arcole ; lors de la démolition de cette église, en 1837, il fut transporté, pierre par pierre, à Saint-Séverin, et rétabli tel qu'on le voit aujourd'hui. Saint-Séverin, avec sa tour dont la flèche et les huit clochetons chargés de dentelures dominent les maisons d'alentour, est très pittoresque ; c'est du haut de cette tour que la cloche sonnait autre fois le couvre-feu pour le quartier de l'Université. Sur la pierre du portail, on lit encore ce distique :

Bonnes gens qui par cy passez.
Priez Dieu pour les trépassez.

Des lions de pierre décoraient jadis chaque côté du portail ; ils remplaçaient sans doute d'autres lions de pierre qui soutenaient le siège où l'archiprêtre venait s'asseoir pour rendre sa justice ; de là la formule que l'on lit sur plusieurs sentences :

Donnée entre deux lions.

Les portes de cette église étaient autrefois chargées de fers à cheval, selon une des pratiques pieuses du moyen âge : Quand un chevalier se disposait à partir pour un voyage lointain, il venait invoquer saint Martin, l'un des patrons de cette église, dans sa chapelle particulière, faisait rougir la clé de la chapelle au feu des thuriféraires, en marquait les flancs de sa haquenée et clouait le fer à cheval votif à la porte de l'édifice. Les trois étages supérieurs de la façade, indiqués par autant de balustrades, appartiennent au XVIe siècle. La statue de la Vierge, qui couronne le pignon, n'a été sculptée qu'en 1842.

A l'intérieur, lisons-nous dans Paris illustré, on remarque les nombreuses ramifications des nervures des voûtes et la physionomie originale du triforium du choeur qui rappelle le style perpendiculaire anglais. Les travées de l'abside ont été défigurées au XVIIe siècle par des placages de marbre qui recouvrent les piliers et transforment les ogives en pleins cintres. Cette décoration de mauvais goût et le baldaquin du maître-autel, ont été exécutés par Baptiste Tuby, sur les dessins de Charles Lebrun et aux frais de Mlle de Montpensier. Le buffet d'orgue est de 1747. Les quinze fenêtres hautes de la nef, à partir de la quatrième travée, sont ornées de vitraux du XVe et du XVIe siècle, assez maladroitement restaurés il y a quelques années.

Nous signalerons surtout l'arbre de Jessé dans la rose du portail principal. Derrière le maître-autel, la chapelle de Notre Dame des Sept Douleurs renferme un groupe représentant la Vierge tenant sur ses genoux le cadavre du Christ. A droite du chevet de l'église, se trouve la chapelle de Notre-Dame-de-l'Espérance, reconstruite dans la seconde moitié du XVIIe siècle. Les statues de le Vierge et de l'Enfant-Jésus, par Bridan, qui surmontent l'autel, ont été couronnées il y a quelques années au nom du chapitre de Saint-Jean-de-Latran, à Rome. Les murs de la chapelle sont couverts d'ex-voto et de plaques de marbre blanc portant des inscriptions commémoratives. Toutes les autres chapelles de Saint-Séverin ont

Intérieur de l'église Saint-Séverin.
été récemment décorées de peintures murales dues aux pinceaux de MM. Signol, Schnetz, Biennoury, Murat, Paul et Hippolyte Flandrin, Alexandre Hesse, Cornu, Gérôme, Lenoir, Jobbé-Duval, Mottez Richomme, etc. On voit par la nomenclature de ces noms l'importance des oeuvres artistiques que possède cette église.

Guillaume Fusée, président du parlement, sa femme, la vicomtesse d'Ambriers, Etienne Pasquier, Scévole, Louis de Sainte-Marthe et Louis-Elie Dupin y furent inhumés ; au sud de la nef existe encore un assez beau cloître du XVe siècle.

Entre plusieurs reliques qui y furent conservées, figure « le bras de monseigneur saint Séverin ». Lorsque les femmes relevées de couches venaient entendre à cette église leur messe de relevailles, on leur mettait un manteau fourré sur les épaules pour les préserver du froid. A la fête de la Pentecôte, il était d'usage de lâcher dans l'église plusieurs pigeons pour figurer la descente du Saint-Esprit sur les apôtres.

Pendant le moyen âge, on voyait auprès de Saint-Séverin une de ces cellules auxquelles on donnait le nom de réclusoir et dans lesquelles
s'enfermaient des pénitentes qui se condamnaient aux plus dures austérités.

Du côté du midi se voyait un charnier dont quelques arcades subsistent encore et l'ancien cimetière paroissial, qui est devenu un jardin pour le curé. Sur la porte du passage menant de ce cimetière à la rue de la Parcheminerie, on lisait :

Passant, penses-tu passer par ce passage
Où, pensant, j'ai passé ?
Si tu n'y pense pas, passant, tu n'es pas sage,
Car, en n'y pensant pas, tu te verras passé.

L'église Saint-Séverin eut peu à souffrir de la Révolution. Le 26 janvier 1794, sur la demande de la régie des poudres et des salpêtres, le citoyen Dupont, sous-commissaire, fut chargé de se transporter à la ci-devant église Saint-Séverin, à l'effet de vérifier les objets qui y existaient et qui gênaient les opérations que la régie devait y faire pour l'exploitation du salpêtre.

En 1802, cette église devint la seconde succursale de la paroisse de Saint-Sulpice.

En 1841, on exécuta, sous la direction de MM.Lassus et Gréterin, architectes, des travaux de réparations à la façade occidentale de l’édifice qui coûtèrent environ 77,000 francs.

Ajoutons qu'avant 1789, la fabrique de l'église Saint-Séverin distribuait chaque année un prix de vertu aux cinq filles les plus sages de la paroisse. Il paraît que les candidates étaient très nombreuses, cela faisait l'éloge des paroissiennes.

A cette époque, la cure de Saint-Séverin rapportait 5,000 livres, et avait près de 1,900 livrés de charges. Aujourd'hui, elle est cure de seconde classe.

Pendant la Commune de 1871, un club dit de Saint-Séverin fut établi dans l'église, qui n'eut à subir aucune dégradation.

Il serait naturel de supposer que sous le triste règne de Philippe tout fut sombre et lugubre, l'historien Mézeray nous en a laissé un tableau bien différent ; selon lui, le luxe des habits, la danse lascive, la multiplication des procès, étaient des vices communs à la cour et à la ville. On ne voyait, dit-il, que jongleurs et farceurs, ce qui signifie un goût effréné pour les spectacles tels qu'on les avait alors.

Les sexes et les âges étaient également dissolus et sans pudeur, passionnés pour les changements de mode. La bigarrure des habits les déguisait chaque jour, de sorte qu'on aurait pris la nation pour une troupe de bateleurs et de fous. « Les malheurs de la nation ne la corrigèrent pas ; les pompes, les jeux et les tournois continuaient toujours. Les Français dansaient pour ainsi dire sur les corps de leurs parents. Ils semblaient se réjouir de l'embrasement de leurs châteaux et de leurs maisons et de la mort de leurs amis. Durant que les uns étaient égorgés à la campagne, les autres jouaient dans les villes. Le son des violons n'était point interrompu par celui des trompettes et l'on entendait en même temps la voix de ceux qui chantaient dans le bal et les pitoyables cris de ceux qui tombaient dans les feux, ou sous le tranchant du glaive. »

Un autre chroniqueur, Robert Gaguin qui écrivait au XVe siècle, parlant des modes parisiennes en 1346, s'élève fortement contre leur changement perpétuel. « Dans ce temps-là, dit-il, les habits étaient très différents. En voyant les vêtements des Français, vous les auriez pris pour des baladins. Tantôt les habits qu'ils adoptent sont trop larges, tantôt ils sont trop étroits, dans un temps ils sont trop longs, dans un autre ils sont trop courts. Toujours avides de nouveautés, ils ne peuvent conserver pendant l'espace de dix ans la même forme de vêtements. » On voit que, sous ce rapport, les siècles en s'écoulant, n'ont rien modifié dans les habitudes des Parisiens relativement à la mode.

Nous avons cité les principales exécutions faites par les ordres du parlement, ajoutons-y celles de Jourdan Perron, damoiseau pendu en 1333, Mathieu de Houssaie, chevalier pendu la même année et noyé ensuite avec plusieurs autres, et onze gentilshommes accusés en 1334 du meurtre d'Émeri Béranger, décapités et pendus, après avoir subi une longue détention dans les prisons du Châtelet.

En 1339, maître Robert Langlois et deux moines allemands du collège des Bernadins, furent accusés de conspirer contre la vie du roi et celle de la reine « par mauvais art et invocation du diable. » Un nommé Hennequin, qui eut connaissance du fait et ne les dénonça pas, fut emprisonné à Saint-Martin-des-Champs et à la fin de décembre 1340 fut exposé au pilori ; les autres furent pendus.

En 1347, le sixième jour de mars, furent bouillis en la place aux Pourceaux Me Étienne de Saint-Germain, dit de Compiègne, et Henri Foisnon écuyer de Treslan « pour avoir taillé coins à faire brûler et coins à faire deniers d'or à l'ange, » et puis furent pendus. (On plongeait les gens à faire bouillir dans une chaudière remplie d'eau bouillante.)



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