Vie quotidienne a Paris
Cette rubrique vous livre les secrets de la vie quotidienne d'autrefois à Paris, consignant les activités des Parisiens d'antan, leurs habitudes, leurs occupations, leurs activités dont certaines ont aujourd'hui disparu. Pour mieux connaître le Paris d'autrefois dans sa quotidienneté.
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LES VOITURES
(D'après un article, paru en 1782)

Gare les voitures ! Je vois passer dans un carrosse le médecin en habit noir, le maître à danser dans un cabriolet, le maître en fait d'armes dans un diable ; et le prince court à six chevaux ventre à terre, comme s'il était en rase campagne. L'humble vinaigrette se glisse entre deux carrosses, et échappe comme par miracle : elle traîne une femme à vapeurs, qui s'évanouirait dans la hauteur d'un carrosse. Des jeunes gens à cheval gagnent impatiemment les remparts, et sont de mauvaise humeur, quand la foule pressée, qu'ils éclaboussent, retarde un peu leur marche précipitée.

Les voitures et les cavalcades causent nombre d'accidents, pour lesquels la police témoigne la plus parfaite indifférence. J'ai vu la catastrophe du 28 mai 1770, occasionnée par la foule des voitures qui obstruèrent la rue, unique passage ouvert à l'affluence prodigieuse du peuple qui se portait en foule à la triste illumination des boulevards. J'ai manqué d'y perdre la vie. Douze à quinze cents personnes ont péri, ou le même jour, ou des suites de cette presse effroyable.

J'ai été renversé trois fois sur le pavé à différentes époques, et sur le point d'être roué tout vif. J'ai donc un peu le droit d'accuser le luxe barbare des voitures. Il n'a reçu aucun frein, malgré les réclamations journalières. Les roues menaçantes qui portent orgueilleusement le riche, n'en volent pas moins rapidement sur un pavé teint du sang des malheureuses victimes qui expirent dans d'effroyables tortures, en attendant la réforme qui n'arrivera pas, parce que tous ceux qui participent à l'administration roulent carrosse, et dédaignent conséquemment les plaintes de l'infanterie.

Le défaut de trottoirs rend presque toutes les rues périlleuses : quand un homme qui a un peu de crédit est malade, on répand du fumier devant sa porte, pour rompre le bruit des carrosses ; et c'est alors surtout qu'il faut prendre garde à soi. Jean-Jacques Rousseau, renversé en 1776 sur le chemin de Mesnil-Montant par un énorme chien danois qui précédait un équipage, resta sur la place, tandis que le maître de la berline le regardait étendu avec indifférence. Il fut relevé par des paysans, et reconduit chez lui boiteux et souffrant beaucoup. Le maître de l'équipage ayant appris le lendemain quel était l'homme que son chien avait culbuté, envoya un domestique pour demander au blessé ce qu'il pouvait faire pour lui tenir désormais son chien à l'attache, reprit le philosophe, et il congédia le domestique.

Quand un cocher vous a moulu tout vif, on examine chez le commissaire si c'est la grande ou la petite roue ; le cocher ne répond que de la petite ; et si vous expirez sous la grande roue, il n'y a point de dédommagements pécuniaires pour vos héritiers. Puis il est un tarif pour les bras, les jambes, les cuisses ; et c'est un prix fait d'avance. Que faire ? Bien écouter quand on crie, gare ! gare ! Mais nos jeunes phaétons font crier leurs domestiques de derrière le cabriolet. Le maître vous renverse, puis le valet s'égosille, et se ramasse qui peut.


 

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