Rues et places de Paris
Cette rubrique vous livre les secrets de l'histoire des rues et places de Paris : comment elles ont évolué, comment elles sont devenues le siège d'activités particulières. Pour mieux connaître le passé des rues et places dont un grand nombre existe encore.
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RUE DE BIÈVRE,
Ve arrondissement de Paris
(D'après Histoire de Paris rue par rue, maison par maison, paru en 1875)

Notice écrite en 1857. La rue a perdu plus récemment sur le passage du naauveau boulevard Saint-Germain, six ou huit maisons, les dernières.

Une Rivière qui découche. Les Bateliers de l'An 1292. Le Dante. Série de Bourgeois :
L
a petite rivière de Bièvre se jetait dans la Seine, à l'endroit justement où passe la rue du même nom ; les chanoines de Saint-Victor obtinrent, sous le règne de Louis XII, par l'entremise de saint Bernard, que ce cours d'eau fût détourné, pour baigner leur enclos et y faire marcher un moulin. Cette prise d'eau coûta bien quelque argent aux frères victorins, d'abord à titre d'indemnité, puis comme frais de procédure, car l'abbaye de Sainte-Geneviève n'oublia pas de réclamer la Bièvre, distraite d'un territoire qu'elle avait toujours arrosé. Le poète Santeul chanta plus tard le ruisseau, qui ne coulait plus rossignolant que dans les bois de Saint-Victor ; il était alors victorin, et les génovéfains ne pensaient déjà plus au détournement dont s'applaudissaient encore leurs voisins. Les procès et les rivières passent, restent les vers. Il faudrait un second déluge pour restituer le cours qui date du premier à la mignonne rivière, dont l'enlèvement mit en liesse pourtant de générations le couvent ravisseur ! Elle prêta, du reste, son nom, moins près de la Seine, à une rue différente, qu'on a dite ensuite des Gobelins.
Celle dont il s'agit ici n'avait encore pour habitants sujets à la taille en l'an 1292 que quatre passeurs, dont on prenait les bateaux ou le bac, pour traverser soit le fleuve en entier, soit son bras gauche, à l'ancienne embouchure de l'affluent. Ils avaient noms :

Thomas, Guill'Malherbe, Thomas Morel, Hémon.

La rue toutefois devait être plus peuplée : il y avait assez longtemps qu'on n'y pêchait plus à la ligne ! Si les taillables y restaient en petit nombre, c'est que leurs voisins devaient à la noblesse, à l'état ecclésiastique ou à un privilège particulier leur affranchissement de ladite imposition de deniers.

Douze ou quinze ans après, un illustre proscrit italien vint à Paris, dans le cours de ses voyages, et il y descendit rue de Bièvre. Cet étranger était un glorieux poète, que nous connaissons tous : le Dante. On sait qu'il composa en exil la Divine Comédie, mais, dans son séjour à Paris, a-t-il vu s'entrouvrir, pour son génie, ce paradis dans lequel Béatrix l'a tenu tendrement par la main, ou cet enfer qui l'aurait fait reculer s'il n'eût pas eu Virgile pour guide ? C'est dans le Xe chant de son Paradis qu'il parle avec éloge, d'un professeur Sigier, dont il a pris des leçons de philosophie rue du Fouarre ; son maître de littérature était, au même temps, Brunetto Latini. L'écolier de passage avait 29 ans.

Plût à Dieu que Germain Pilon, le sculpteur du XVIe siècle, eût habité aussi la rue de Bièvre ! Une note prise aux Archives nous en donnait l'espoir à première, vue ; mais le désenchantement est venu avec une date postérieure, et nous ne tenons plus qu'un descendant de l'émule et ami de Jean-Goujon. Cet homonyme de Germain. Pilon prit à bail emphytéotique du collège Saint-Michel, au prix, de 1800 litiges comptant et 100 de rente, une maison qui devait être notre n° 12 ou la maison suivante. Son fils Robert Pilon hérita de cet usufruit vers l'année 1655. Le bourgeois Jean Quinebeuf ; sieur d'Orly, se rendit en 1703 adjudicataire du droit au bail dans ce qui restait à courir des 99 années pour lesquelles il avait été consenti.

D'autres propriétaires, contemporains de Robert Pilon, le suivaient immédiatement dans cet ordre :

Et il y avait encore dix maisons sur la même ligne, entre ce Saint-Joseph et l'endroit où la rue Saint-Victor se confond avec la place Maubert.

Nous croyons retrouver l'ancienne propriété de Mme Turpin dans le n° 20, qui a vu le jour sous un roi de la race capétienne ; celle de Bracquet dans le 24, qui appartint à M. Daudet, oncle du curé actuel de Saint-Roch, avant son émigration, et celle de Mlle Bourlon dans le 28, dont la porte, la rampe en bois et la margelle du puits sont des reliques bien conservées.

La Marquise de Brinvilliers. Autre série de Bourgeois. La Communauté de la Boucherie. Histoire d'un Collège. Le Cardinal Dubois :
C
ette dernière maison n'en fut pas moins achetée de messire Armand-Jean de Riandz, chevalier, seigneur de la Bellezière et autres lieux, conseiller d'État, procureur du roi au Châtelet, par dame Élisabeth Pigneron, veuve de messire Enry Philippe, conseiller d'État, maître en la cour des comptes, le 12 septembre 1659. Quarante-huit ans plus tard en héritait la dame Dumousseau, veuve de messire de Louvières, chevalier, seigneur de Vauchamps, premier écuyer du roi, qui la laissait, en l'an 1721, à haut et puissant seigneur Henry-Bernard Delacroix, marquis de Saint-Vallier, époux de dame Rénée de Louvières. Puis le sieur Michaud et la dame de Biard de Saint-Aubin, sa femme, s'en rendaient acquéreurs en 1764. Mais ces divers propriétaires, n'ayant pas tous habité la maison, l'avaient donnée a bail, en 1756 à Pierre Doublet avocat, dix ans plus tôt à Galibour, procureur au parlement, et antérieurement à Lamarre de Verdancher, à Lebeau, procureur. En remontant encore, nous découvrons qu'Elisabeth Pigneron a eu pour locataire, dans cet hôtel, une femme qui demeura aussi rue Neuve-Saint-Paul, et dont le nom n'a rien à craindre de l'oubli : damoiselle Marie Marguerite, fille de Dreux d'Aubray, lieutenant civil, et mariée en l'année 1651 au marquis de Brinvilliers, mestre de camp du régiment de Normandie.

Cette héroïne des fastes judiciaires était petite, mais jolie et gracieuse, et d'un extérieur plein de modestie, bien qu'a l'age de sept ans elle eût déjà péché autrement que de gourmandise ; elle continua, quoique mariée, à demeurer avec son père et ne se sépara que de biens avec le marquis, un peu plus tard, afin de mettre à l'abri des prodigalités de celui-ci ses 40,000 livres de rente. Il avait introduit chez elle Gaudin de Sainte-Croix, jeune officier, beau cavalier, originaire du Midi, qui devait déjà sa naissance à l'amour. La marquise eut beau avertir M. de Brinvilliers du danger des assiduités de Sainte-Croix, le mari ne s'en reposa qu'avec plus de sécurité sur la vertu de la marquise, et l'amoureux en profita, mais il dut une lettre de cachet à la prudence plus chatouilleuse du père, le lieutenant civil. Malheureusement à la Bastille l'officier fit lit connaissance d'un empoisonneur italien, et une fois libre il revit la maîtresse dans le carrosse de laquelle il avait été arrêté. Avant peu, le lieutenant civil succombait inopinément ; puis le mal parut contagieux, et les plus importuns témoins des liaisons adultères de la marquise moururent l'un après l'autre : des biscuits servis en famille envoyaient ses deux frères et sa sœur rejoindre la première victime. Comme le poison attire le poison ! La fiole en déborde dès la première coupe, sur la main tremblante qui la brise et qui en est éclaboussée ; tant que l'impunité permet aux gouttes de se rejoindre dans le creux de cette main, qui ne se ferme plus, le liquide léthifère bout d'impatience et s'élève dans sa crûe à lai hauteur d'une nouvelle fiole : la marée du poison monte, monte et ne s'arrête qu'à la digue de la justice !

Mme de Brinvilliers voulait aussi tuer son mari, afin d'épouser son amant ; mais ce complice craignait trop que la progression ne s'arrêtât pas là, et il mettait son habileté à faire prendre tous les jours du contrepoison au marquis, sans que ce dernier s'en doutât. D'autres furent moins, favorisés, n'ayant pas fait provision d'antidote, et le cercle de mort tracé par la marquise s'élargit démesurément. Qui donc l'eût soupçonnée ? elle avait conservé tous les dehors d'une piété sévère, et de plus elle était réellement dévote ; la preuve, c'est qu'une confession générale, écrite de sa main dangereuse, servit de pièce de conviction quand elle parut devant ses juges. Tous ses crimes probablement fussent demeurés impunis, si tout à-coup Sainte-Croix n'avait pas été tué, au mois de juillet 1672, par le hasard qui détacha son masque, pendant qu'il faisait du poison dans un laboratoire secret, place Maubert. Les scellés furent posés chez lui ; mais Mme de Brinvilliers réclama vivement une cassette, qu'on lui refusa et qu'on ouvrit. Elle prit la fuite. Un exempt de police, déguisé en abbé galant, alla lui faire la cour à Liège et la rassura à tel point qu'ils s'en revinrent de compagnie ; à la frontière, l'expiation commença. On sait que la grande coupable monta, sur l'échafaud ; et qu'ensuite son corps fut brûlé ; le peintre Lebrun avait fendu la presse pour assister à son supplice et léguer ses traits à l'histoire. Mme de Sévigné a parlé de la fermeté avec laquelle elle mourut. Du reste, après avoir entendu sa condamnation, l'empoisonneuse célèbre avait fait des aveux complets. M. de Lamoignon lui avait adressé le docteur de Sorbonne Edme Picot, pour l'assister dans ses moments suprêmes, et ce prêtre l'avait trouvée tellement détachée du crime par le repentir, pendant les quatre dernières heures de sa vie, qu'il eût voulu être à sa place. Ajoutons que le peuple fit à peu près comme le docteur ; il alla remuer le lendemain les cendres de la suppliciée, qu'il ne regardait plus que comme une bienheureuse. Nous n'avons rien à dire d'une résipiscence qui a jeté tant d'éclat, cette réhabilitation n'en a pas moins été prématurée et dangereuse par ses conséquences immédiates. Après la mort de cette grande coupable, sans aucun temps d'arrêt, les empoisonnements continuèrent, et la Voisin, la Vigoureux, l'Italien Exili furent condamnés, comme la Brinvilliers, en Chambre ardente, dite aussi la Cour des Poisons.

Le n° 34 ne remonte pas aux Croisades ; mais des soldats anglais ont pu y présenter des billets de logement, sous la régence du duc de Bedfort. Le style de sa belle façade en tombe d'accord avec celui du petit escalier qui conduit a ses grandes chambres, plafonnées tout au plus depuis dix lustres : un procureur au parlement de Paris y prit sa retraite quelques années avant la suppression de cette cour.

Le 31 et le 33 n'ont pas de droit d'aînesse à envier aux précités. De ce côté la cinquième maison que vous trouvez dans la rue de Bièvre, en partant de la rue Saint-Victor, arborait encore il y a cent ans l'image de Saint-Martin, dépendait de l'ancien hôtel de Braque (de la rue des Bernardins) et appartenait au comte de Vienne. Cuvillier de Brichanteau, fils d'un lieutenant des gardes de la prévôté de l'hôtel, avait vendu un demi-siècle auparavant la maison qui vient la sixième dans le même sens à l'avocat Levaillant. La septième, dite alors le petit hôtel de Troyes, et la neuvième appartenaient a l'évêché de cette ville. Le 23 fut aussi un logis de procureur. Au 21, qu'habite un corroyeur, se remarquent un superbe escalier de bois et un dessus de porte cochère, objet d'art exposé près de la loge du portier. Ce toit, pendant cent cinquante ans, a abrité la famille, parlementaire des Lahille, et une tradition veut que la reine Blanche ait posé, lors de l'ouverture de la rue, la première pierre de cette maison, dont toutes les fenêtres, il n'y a pas longtemps, étaient encore Protégées par des grilles. Le 3 et le 7 sont le derrière de deux numéros pairs de la rue des Bernardins.

Quatre siècles pour le moins ont passé sur le 4 et le 6, qui sont bien frères jumeaux ; toutefois leur aspect sénile n'effraie guère les jeunes ménagères qui viennent y battre du linge, dans un lavoir. Ils ont fait partie du patrimoine fondamental d'un petit collège dont nous donnerons tout à l'heure l'historique, et la place qu'ils occupent était encore qualifiée le Trou de Bièvres au moment de la construction. C'est pourtant d'une autre dépendance du même établissement scolaire que Chomel, médecin des eaux de Vichy, se rendit acquéreur, au milieu du règne de Louis XV, et qu'il laissa ensuite à son neveu, médecin du même nom.

Tout près de là, rue de Bièvre et rue Perdue, l'un des contemporains de la Brinvilliers, Jacques du Chesne, avocat au conseil, banquier expéditionnaire en cour de Rome ; disposa de deux anciens corps d'hôtel, encore dits le Chastel Maugarny ; il y tenait d'une part à Popin, secrétaire du roi, d'autre part à Gaspard Donné, marchand, et aboutissait par derrière au jardin du collège Saint-Michel.

Dans la même rue, sous Louis XVI, il y avait une manufacture de bonneterie en activité et le bureau des Bouchers, précédemment installé place aux Veaux. Peu de communautés établies en corps de jurande avaient l'importance de la communauté de la Boucherie.

A la suite d'excès commis par les Ecorcheurs, bande redoutable de bouchers affiliée au parti du duc de Bourgogne, un édit de Charles VI avait supprimé les privilèges des deux grandes boucheries de Paris, celle du Parvis Notre-Dame, cédée à l'évêque par Philippe Auguste, et celle de l'Apport-Paris ; dès lors les bouchers n'avaient plus formé qu'une compagnie pareille à celle des autres arts et métiers. Les statuts de 1687, augmentés en 1730, s'opposaient formellement à la réception d'un maître qui ne fût pas fils de maître, ou qui n'eût pas servi comme apprenti pendant trois ans et acheté, habillé, débité et vendu chair pendant trois autres années, etc. Il était défendu à un garçon de prendre un nouveau maître, et à celui-ci de le recevoir sans la permission de l'ancien maître, sous peine de 32 livres parisis pour, l'employé et de 80 pour le patron. Après trois années d'apprentissage, on restait le même temps compagnon. Les frais du brevet allaient, à 202 livres, ceux de la maîtrise à 1500. Quatre jurés, les chefs de la communauté, étaient tenus de visiter toutes les bêtes amenées, tuées et exposées en ville, en empêchant de vendre aucune viande de bête morte en maladie, ou ayant été nourrie ès-maisons d'Huiliers, Barbiers, Maladreries. Au marché de Sceaux, qui se tenait chaque lundi, et au marché de Poissy, tous les jeudis, une caisse était ouverte pour les bouchers, qui payaient d'intérêt le sou pour livre, à la condition de rendre dans la quinzaine l'argent qui leur était prêté. Mais aucun d'eux ne pouvait être arrêté pour ses dettes la veille ou le jour d'un marché.

L'ancien collège de Saint-Michel se reconnaît, n°s 10 et 12, à une figure du saint patronymique terrassant toujours un dragon, et pourtant la principale porte en donnait sur la rue Perdue. La chapelle y est devenue le bureau d'un maître chaudronnier. Or ça, collège de Saint-Michel, quelle a été ta destinée ? Où commences-tu, où finis-tu, dans l'histoire de la rue de Bièvre ?

Un évêque de Paris, Guillaume de Chanac, qui est mort le 3 mai 1348, a consacré par testament la propriété que voici a l'établissement d'un collège, sous l'invocation de saint Michel en fondant dix ou douze bourses, à la collation de sa famille ; un des boursiers y devait être chapelain, un autre remplir la fonctions de procureur, et il devait y avoir, outre cela, un principal ; il était dit enfin que les boursiers seraient choisis a perpétuité dans le diocèse de Limoges. Mais les sommes léguées par l'évêque de Paris étant insuffisantes, un autre Guillaume de Chanac, évêque de Mende, et le cardinal Bertrand, patriarche de Jérusalem, sont venus s'associer à l'œuvre ; ils ont donné 500 livres chacun aux principal et écoliers, et il leur ont abandonné, en sus, le premier sa crosse, sa mitre et sa bibliothèque, le second une maison, dite du Patriarche, au faubourg Saint-Marcel. Aussi bien les Chanac ont été une famille si étroitement, alliée à celle de Pompadour qu'en 1510 Antoine de Pompadour, au nom du premier fondateur, renouvelait la fondation, en maintenant à sa postérité le pouvoir de nommer aux bourses du collège Saint-Michel, également appelé de Chanac, lequel y gageait un nom de plus, celui de Pompadour.

Haut et puissant seigneur Renaut-Elie de Pompadour avait épousé Galienne de Chanac, dès le règne de Jean-le-Bon. Une transaction, passée le 17 février 1703 devant Monet, notaire, a transféré de Marie de Pompadour, marquise de Saint-Luc, à Marie-Françoise de Pompadour, marquise d'Hautefort, sa sœur, et à tous héritiers dicelle, le patronage de cette institution comme étant attaché au marquisat de Pompadour, échu à Mme de Hautefort. Mais cette branche s'est éteinte en 1722, et le prince de Chalais, puis le comte de Périgor au nom de son épouse Mlle de Chalais, ont joui de la même prérogative, pendant que Mme d'Etioles, née Poisson, qui n'avait rien de commun avec l'ancienne maison de Pompadour, en prenait le titre et les armes par la grâce de lettres patentes.

L'administration déplorable des deniers de l'établissement pédagogique de la rue de Bièvre y avait déjà donné plus de vacances que n'en accordait l'université de Paris, et ces relâches avaient introduit de mauvaises mœurs y tuant la discipline. Peu de place restait aux élèves du temps de l'avocat Jacques du Chesne ; un marchand de chevaux, le sieur Lauris, leur en avait assez pris en location pour y établir un manège. Après une longue série de petites prévarications dans l'administration de leur temporel, il fallut suspendre les bourses pour un temps indéterminé, par décision universitaire du 16 juillet 1729 ; ce déclassement provisoire, mais sans restriction, dura trente-quatre années, et les biens de la fondation grevée de dettes étaient régis par M. Morin, simple administrateur ; lorsque le collège Saint-Michel fut au nombre de ceux réunis par le parlement à Louis-le-Grand, devenu la métropole de l'université. Son revenu net s'élevait à 3,170 livres quand les dernières bourses qu'il pût entretenir furent transférées au dit chef-lieu, et la Nation en profita lors de la suppression générale des anciennes bourses, au commencement de l'ère républicaine. Lemaître de pension Collombet n'avait pas même attendu que la première de ces deux mesures fût prise pour s'installer, à titre de locataire, dans le bâtiment principal. Les familles de chacun de ses élèves payaient à M. Collombet de 350 à 400 livres par an. M. Fouille, autre maître de pension établi dans la même rue, prenait des élèves aux mêmes conditions.

Un principal du petit, collège avait eu pour domestique, en même temps que, pour élève surnuméraire, un enfant de douze ans qui était devenu un personnage fameux. Cet enfant, né en 1636 à Brive-la-Gaillarde, c'est-à-dire dans : le Limousin, avait été envoyé à Paris par son père, simple apothicaire, dans l'espoir d'une bourse, que l'état déjà désastreux des finances de la maison l'avait empêché d'obtenir, et il avait été réduit à s'y mettre en service, puis il avait obtenu la permission de suivre les cours quand il en aurait le temps. En quittant l'établissement, le convers devenu lettré était entré avec le petit collet chez un marchand du Petit-Pont, comme précepteur de son enfant, puis en la même qualité chez le président de Gourgues, puis chez le marquis de Pluvant, maître de la garde-robe de Monsieur ; enfin M. de Saint-Laurent, sousprécepteur du duc de Chartres, l'avait employé de seconde main à corriger les devoirs du prince. Tels furent les échelons de la fortune pour un cuistre, qui ne s'arrêta pas en si beau chemin. Il se montre assez grand politique pour qu'on lui passât bien des choses ; mais il en abusa si fort, une fois ministre et prince de l'Église, que son nom de cardinal Dubois ne fait pas plus honneur au berceau de ses études qu'à sa famille, qui refusa de garder son héritage.


 

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