Rues et places de Paris
Cette rubrique vous livre les secrets de l'histoire des rues et places de Paris : comment elles ont évolué, comment elles sont devenues le siège d'activités particulières. Pour mieux connaître le passé des rues et places dont un grand nombre existe encore.
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RUE BAILLEUL Ier arrondissement de Paris
(D'après Histoire de Paris rue par rue, maison par maison, paru en 1875)

Notice écrite en 1857.

La Reine Blanche :
On allait encore voir, il y a trois années, rue Bailleul, au coin de la rue Jean-Tison, une des anciennes maisons de campagne de la reine Blanche ; elle remontait à l'époque où Paris n'avait pas encore franchi la rive droite de la Seine et où le palais des rois était celui dans lequel la justice, depuis lors, se rend en leur nom. Une Charmante tourelle flanquait ce monument domestique du moyen âge ; elle a été achetée, la veille de la démolition, par un particulier qui en a orné son château. Cette maison de la reine Blanche avait été aussi un couvent et une léproserie ; des annelures de fer, qu'on a trouvées dans ses souterrains celluleux, prouvaient aussi qu'on y avait pratiqué le paternel système de l'emprisonnement combiné mystérieusement avec l'isolement, système dont notre siècle se croirait à tort l'inventeur. Le brevet de perfectionnement reste lui-même parfaitement à prendre, en ce qui regarde les garanties à exiger du geôlier, pour empêcher qu'on rende un jour ou l'autre à des cellules si ingénieusement multipliées l'ancienne destination des in-pace, des oubliettes.

Bailleul :
La rue Bailleul pourrait être d'origine royale : il y a eu des Bailleul ou Baleol, rois, d'Écosse. On dit pourtant que le parrain de cette rue fut Robert Bailleul, clerc des comptes, et qu'il habitait une maison ayant un revers rue des Poulies, qui pouvait être, en l'année 1423, le 2 actuel. Au nombre de ses descendants purent être : Nicolas de Bailleul, chevalier, seigneur de Watrelos-sur-Mer et de Choisy-sur-Seine, conseiller d'État et lieutenant civil à Paris, puis prévôt des marchands de 1622 à 1627, et Michel Le Bailleul, sieur de Soisy, conseiller au parlement, puis surintendant des finances, mort en l'année 1653. La rue s'était appelée Averon en l'an 1271.

Hôtelleries :
Si nous repassons de là au commencement du dernier siècle, nous comptons dans la rue Bailleul 10 maisons, 4 lanternes. Quelque soixante années plus tard, trois maisons sur les dix sont des hôtelleries. Mme Chevreuil y loge tout venant, pour 35 sols par mois, et les repas chez elle sont côtés de 4 à 8 sols : ce qui donne à entendre qu'on ne les sert pas dans la vaisselle du célèbre orfèvre Germain. Chez Dubut, mêmes conditions. Huet, à l'hôtel d'Aligre, tient ses prix bien plus élevés : prend pour le logement de 3 à 15 livres par mois. Il est probable que cette dernière maison garnie occupait les derrières de l'ancien hôtel Schomberg-d'Aligre, dont les deux cours figurent à merveille dans le plan de Paris de 1714.

Le Restaurant Duru :
Un traiteur d'un autre genre a fait concurrence à Huet, en transférant, dans l'autre cour, c'est-à-dire du côté de la rue Saint-Honoré, le premier établissement qui se soit qualifié restaurant. Un Duru tenait alors l'auberge de la Providence au faubourg du Roule ; la rue Bailleul n'a vu s'ouvrir que vers l'année 1780, à l'encoignure de la rue des Poulies (aujourd'hui du Louvre), l'établissement qu'on nomme encore le restaurant Duru. Mais ne trouvez-vous pas par trop gourmand le devancier des traiteurs précités qui avait pris un Louis d'or pour enseigne ?

Académie de la Danse :
En ce temps-là le chancelier Étienne d'Aligre, prédécesseur du chancelier Séguier, sortait de chez lui et y rentrait par les deux portes qui répondent rue Bailleul aux n°s 8 et 10, et son hôtel n'était encore une cour que grâce aux séances du grand-conseil du roi qui s'y tenaient (voir la notice de la cour d'Aligre). Des réunions académiques avaient également lieu tous les jeudis dans cette rue, derrière l'hôtel d'Aligre, chez Beauchamps, maître des ballets du roi et chancelier de l'Académie royale de la danse. Le Livre commode d'Abraham du Pradel (1691) nous apprend que cette Académie au petit pied « tenait naguères ses assemblées aux Tuileries, dans l'antichambre de Monseigneur. » Les membres n'étaient d'abord qu'au nombre de treize ; qui devait son augmentation à l'agrégation de ceux qui avaient eu l'honneur de danser dans les ballets de Sa Majesté. Des personnes de considération assistaient aux exercices gratuits de la compagnie. Le droit de réception à payer était modique ; les maîtres recevaient deux jetons d'argent les jours d'exercice et le premier jeudi de chaque mois, jour de l'assemblée générale, ainsi que le premier mai, ce qui nous porte à croire que le patron était saint Philippe. Plusieurs des maisons de la rue Bailleul avaient, alors pour propriétaire le marquis de Blainville.

La Saint-Barthélemy :
Du vivant de Catherine de Médicis, un duc appartenant au parti protestant demeurait au n° 6, dont une balustrade d'escalier rappelle un peu la splendeur disparue. Des seigneurs qu'il avait pour coreligionnaires, et qui étaient venus de loin pour assister au mariage du roi de Navarre avec Marguerite de Valois, échappèrent à des poursuites, pendant la nuit de la Saint-Barthélemy, en ne faisant que passer par ce logis, pour gagner une auberge de la rue de l'Arbre-Sec.

Maison à deux Visages :
Les d'Aligre avaient acheté le n 5, qu'une de leurs parentes habitait il y a quelques lustres. Le 7 a deux visages, un qui rit à belles dents sur la nouvelle rue de Rivoli, et un autre qui se renfrogne en regrettant lui aussi, son éclat d'autrefois, du côté de la rue où nous sommes.

Le Boulanger :
Au 12 est exploité un fonds de boulanger, depuis l'année de la fête de la Fédération, dans un immeuble qui, à coup sûr, a vu passer le roi des Halles et le cardinal de Retz au temps de la Fronde.


 

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