Histoire de Paris
Cette rubrique vous livre l'histoire de Paris et de ses arrondissements. Origine, évolution, de la capitale de la France. Pour mieux comprendre la physionomie du Paris d'aujourd'hui, plongez-vous dans les secrets de son passée.
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HISTOIRE DE PARIS
(D'après Paris à travers les âges, histoire nationale de Paris et des Parisiens depuis la fondation de Lutèce jusqu'à nos jours, paru en 1879)

Louis IX. – Blanche de Castille – Les écoliers. – Sainte-Catherine du Val des Écoliers. – Les cordeliers. – Les Filles-Dieu. – Un clou perdu. – Saint-Leu-Saint-Gilles. – La Sainte-Chapelle – Le collège des bernardins. – Le départ. – Les Pastoureaux. – L'affranchissement des serfs. – Le collège des prémontrés. – Les jacobins et les bedeaux. – Les blasphémateurs. – Supplices. – Les filles de joie. – Les juifs. – Les chartreux. – Les métiers. – Le bourreau.

Henri Martin en parlant de Louis IX, s'exprime ainsi : « La gloire de Louis IX, tout enveloppé que Louis se soit trouvé dans la plus fatale erreur de son temps, a survécu à toutes les vicissitudes de l'opinion, à toutes les révolutions politiques et religieuses ; les ennemis les plus implacables du passé ont rendu hommage à cette grande figure dans laquelle se résume tout ce qu'il y eut de pur et d'élevé dans le catholicisme du moyen âge. »

Paris sous ce roi célèbre par ses « établissements » ne pouvait manquer de prendre une physionomie nouvelle et de progresser singulièrement, ainsi qu'on va le voir. Ces établissements sont le recueil de toutes les lois promulguées sous la troisième race ; et toutes celles dues à l'initiative de Louis IX sont marquées au coin de la justice et de l'honnêteté.

Toutefois, les lois pénales sont remarquables par leur excessive sévérité, « car le roi voulait que la justice fût bonne et roide, et n'épargnât pas plus le riche homme que le pauvre. » Belles paroles ! que malheureusement ceux qui rendirent la justice, n'eurent pas toujours assez présentes à la mémoire.

Selon Joinville, l'office de la prévôté de Paris se vendait avant le règne de Louis IX au plus offrant parmi les bourgeois ou autres, et ceux qui en étaient revêtus « soutenoient en leurs outrages et déportements leurs enfants et leurs neveux dont il advenoit plusieurs pilleries et maléfices. Pour cette chose le menu peuple étoit trop foulé et ne pouvoit avoir droit des riches hommes, à cause des grands présents et dons qu'ils faisaient au prévôt. Par les grands parjures et rapines qui étoient faits en la prévôté, le menu peuple n'osoit demeurer en la terre du roi et s'en alloit en autres seigneuries et la dite terre étoit si vague (dépeuplée) que

Entrée de la reine Blanche à Paris.
quand le prévôt de Paris tenoit ses plaids, il y venoit si peu de gens que le prévôt se levoit parfois de son siège sans avoir eut nul plaideur. Avec cela il y avait tant de malfaiteurs et de larrons à Paris et au dehors, que tout le pays en étoit plein. »

Louis n'avait que douze ans, lorsqu'en 1226, il succéda à son père Louis VIII, sous la tutelle de sa mère, Blanche de Castille, régente du royaume ; L'année suivante plusieurs grands seigneurs, mécontents de voir la France gouvernée par une femme et un enfant, tentèrent de se débarrasser des deux.

Le duc de Bretagne, le comte de Dreux, son frère et Philippe Hurepel, le propre frère du roi, se mirent à la tête de l'entreprise et imaginèrent de dresser une embûche pour y faire tomber la régente et son fils.

Mais Blanche de Castille savait qu'elle pouvait compter sur l'affection des Parisiens qui combattent volontiers en face, mais n'aiment pas tout ce qui est trahison, et ce fut à eux qu'elle fit appel dans cette circonstance.

Absente de Paris, lorsqu'elle fut avertie de ce qui se tramait contre elle, elle se hâta de ramener le jeune prince dans la capitale et elle avait déjà atteint Montlhéry, lorsqu'elle fut avertie par Thibaut, comte de Champagne, que l'armée des mécontents était campée à Corbeilet qu'elle s'y trouvait bien supérieure en forces à sa faible escorte. Elle s'arrêta et envoya un message aux bourgeois de Paris pour les informer du danger qu'elle courait. Lorsque cette nouvelle parvint à Paris, l'émotion fut grande ; tout le monde s'arma et se leva en masse pour aller dégager le jeune roi. Or, malgré le nombre considérable de gens dont disposaient les rebelles, la contenance des Parisiens leur inspira une si vive crainte, qu'ils n'osèrent rien tenter contre le cortège royal, et Louis arriva sain et sauf dans la capitale.

En 1229, les écoliers firent de nouveau parler d'eux. Plusieurs d'entre eux étaient allés pour se divertir le jour du mardi gras chez un cabaretier du faubourg Saint-Marcel, échauffés par le vin qu'ils avaient bu, lorsqu'il s'agit de payer la dépense, une discussion s'éleva sur le prix du vin, et bientôt, de la discussion ils passèrent aux coups et le malheureux cabaretier eût été assommé, s'il n'eût appelé ses voisins à son secours et que ceux-ci tombant à l'improviste sur les écoliers, ne les eussent chassés du faubourg, en en blessant quelques-uns.

Mais les écoliers excitèrent leurs compagnons à tirer vengeance de cette agression ; dès le lendemain ils se rendirent en troupe dans le faubourg ; armés de bâtons, ils fondirent sur la boutique du cabaretier, brisant tout, mettant tout à sac, puis ce bel exploit accompli, ils se répandirent dans les rues du faubourg, frappant les gens qu'ils rencontraient, blessant les uns, tuant les autres, ne respectant ni l'âge ni le sexe. Cette conduite inqualifiable souleva l'indignation générale et le doyen de Saint-Marcel alla se plaindre au légat qui fit parvenir ces plaintes à la reine régente et lui demanda justice contre les coupables.

Sans plus tarder, Blanche de Castille donna l'ordre aux archers de faire cesser ce désordre et d'appréhender au corps les écoliers qui en étaient les auteurs.

Il était assez difficile de les rechercher, les soldats se contentèrent de se diriger du côté des remparts et rencontrant là des écoliers, sans s'enquérir de la part qu'ils pouvaient avoir prise dans l'échauffourée du matin, ils se jetèrent sur ces jeunes gens qui étaient sans armes et sans défense, les blessèrent et en tuèrent quelques-uns, parmi lesquels « un Flamand et un Normand de considération. » Alors, ce fut au tour de l'Université de jeter les hauts cris. Elle suspendit ses exercices et les professeurs représentèrent au légat qu'il n'était ni juste ni équitable que la faute de quelques écoliers coutât la vie à ceux qui en étaient tout à fait innocents.

Le légat qui n'avait guère sujet d'aimer l'Université et les écoliers, depuis le jour où il avait failli devenir leur victime, ferma l'oreille à ces doléances, la reine ne leur fut pas plus favorable, et l'évêque de Paris refusa d'écouter les remontrances des professeurs. Ce qui fit que, pour la seconde fois, maîtres et écoliers quittèrent Paris. Parmi les docteurs, il y en eut qui se retirèrent à Orléans, d'autres à Angers, et fondèrent des universités dans ces deux villes.
Le légat et l'évêque frappèrent alors d'excommunication tous ceux qui se permettraient de faire des bacheliers hors Paris, et les dominicains profitèrent de ces troubles pour fonder dans la capitale une chaire de théologie.

Albert le Grand fut un des premiers dominicains qui y enseigna, et il eut pour disciple le fameux saint Thomas. Deux années se passèrent de la sorte ; cependant on ne pouvait s'empêcher de regretter que les lettres et les sciences se trouvassent de la sorte exilées de Paris et le pape Grégoire IX écrivit à la reine et au roi qui rappelèrent l'université et lui firent verser une somme d'argent en réparation de l'insulte qui leur avait été faite par les bourgeois et pour que ceux-ci n'abusassent pas de la nécessité dans laquelle se trouvaient les écoliers de loger chez eux, le prix de la location des chambres qu'ils pouvaient occuper fut tarifé.

Tandis que tout ceci se passait, une cérémonie curieuse avait lieu à Notre-Dame. Le comte Raymond de Toulouse, qui était en guerre avec le roi de France, fit sa paix avec lui et dut, aux termes de l'arrangement qui intervint, se présenter en chemise et nu-pieds à la cathédrale, le vendredi saint de 1229, et se prosterner devant le grand autel, en présence du roi et de toute la cour. De là, il devait se rendre en prison à la tour du Louvre, jusqu'à ce que les murailles de la ville de Toulouse fussent rasées, mais le roi voulut bien l'en dispenser.

Ce fut dans cette même année 1229, que fut fondée l'église de Sainte Catherine du Val des Ecoliers ; quatre professeurs de Paris : Guillaume, Richard, Évrard et Manassès, avaient fondé une sorte d'ordre religieux, appelé ordre du Val-des-Ecoliers, dans une vallée stérile du diocèse de Langres. Leur premier soin fut d'ouvrir une maison de l'ordre à Paris et Manassès, l'un d'eux, vint en négocier l'installation ; un bourgeois de Paris, Nicolas Gibonin, lui donna trois arpens de terre, auprès de la place Baudet ; un autre, Pierre de Braine, l'imita, mais ce n'était point encore suffisant ; ce fut alors que les sergents d'armes de la garde du roi, se souvenant d'un voeu qui avait été fait par leur corps à la bataille de Bouvines de bâtir aux écoliers une église, s'entendirent avec Manassès et contribuèrent à l'érection de l'édifice.

Cette église, qui était située sur l'emplacement du marché Sainte-Catherine (IVe arrondissement), fut superbement dotée et le roi lui donna trente deniers par jour, vingt livres parisis de rente, un muid de blé, deux mille harengs et deux pièces d'étoffe de 25 aunes chacune ; les sergents de leur côté lui faisaient une redevance annuelle de dix sous quatre deniers par homme. A l'église était joint le collège, en 1365 les écoliers qui l'habitaient, s'érigèrent en confrérie dans laquelle on n'était admis qu'en payant deux francs d'or en entrant et un tous les ans. Tous les mardis de la Pentecôte, les confrères dînaient dans l'église. Enfin, lorsqu'un sergent d'armes mourait, son écu et sa masse d'armes étaient appendus dans l'église.

Cette maison devint par la suite le collège de toute la congrégation du Val des Ecoliers, mais en 1629, elle passa aux mains d'une congrégation de chanoines de Sainte-Geneviève et en 1782, on la démolit ; sur son emplacement fut ouvert en 1783 le marché Sainte-Catherine.

Louis IX ne cessa d'encourager la fondation des établissements religieux. Une colonie de religieux de Saint-François, était venue à Paris vers 1217, et avait obtenu à grand peine de l'abbé de Saint-Germain-des-Prés un local à titre de prêt, mais vers 1233, ils s'adressaient à saint Louis qui, moyennant l'abandon d'une rente qu'il touchait de l'abbaye, obtint que les religieux de Saint-François (qu'on appela cordeliers parce qu'ils portaient une corde en guise de ceinture), seraient logés dans un grand bâtiment (rue de l'Ecole de Médecine).

Les cordeliers s'y installèrent tout à l'aise ; d'après la règle de leur ordre, ils ne pouvaient rien posséder en propre, mais cela ne les empêchait pas de ne manquer de rien. Ils ne tardèrent pas à jouir d'une réputation de bons vivants qui se répandit partout ; le couplet d'une vieille chanson dit :

Boire à la capucine,
C'est boire pauvrement ;
Boire à la célestine,
C'est boire largement ;
Boire à la jacobine,
C'est chopine à chopine ;
Mais boire en cordelier, s'est vider le cellier !

Primitivement, ils ne devaient avoir chez eux, ni cloches, ni cimetière, ni autel consacré ; mais, grâce à la faveur du roi, ils eurent bientôt tout cela et plus encore, Saint Louis, commença par les autoriser à couper dans les forêts de ses domaines, tout le bois qui leur serait nécessaire pour se bâtir une église ; elle fut bâtie et placée en 1262 sous l'invocation de Sainte-Madeleine ; elle occupait l'emplacement qui forme aujourd'hui la place de l'Ecole de Médecine.

Cette église fut brûlée dans la soirée du 19 novembre 1580. Un religieux étant seul, voulut achever de dire un office et attacha une bougie qu'il avait allumée au lambris de la chapelle de saint Antoine de Padoue, où il y avait une quantité d'ex voto en cire ; il s'endormit (certains historiens prétendent qu'il était ivre), le feu prit et se communiqua avec tant de rapidité et de violence qu'en un moment toute l'église fut embrasée, sans qu'on put y' apporter le moindre secours. Les cloches furent fondues, le choeur, la nef, les chapelles et une partie du cloître, furent ravagés par la force du feu, qui détruisit la plupart des tombeaux qu'on y voyait auparavant. C'étaient les tombeaux du roi Philippe le Long, de plusieurs reines, princes et princesses de France.

Les cordeliers furent souvent, ainsi qu'on le verra, mêlés aux agitations parisiennes.

A la même date, remonte la création d'une maison religieuse destinée à recevoir les pécheresses « qui, pendant leur vie, avaient abusé de leur corps, et, à la fin, étaient tombées dans la mendicité. »

Ce fut Guillaume d'Auvergne, évêque de Paris, qui conçut l'idée charitable de fonder en 1226 un refuge pour les filles de mauvaise vie qu'il parvenait à arracher à leur honteux métier. Il leur donna, dans le voisinage de Saint-Lazare, tout le terrain nécessaire pour se bâtir une maison, mais, en 1360, leur couvent fut démoli par ordre d'Étienne Marcel, prévôt des marchands. Et les Filles-Dieu, c'était le nom qu'on leur avait donné, se retirèrent dans l'hôpital de Sainte-Madeleine, fondé en 1316 par Imbert des Lions, bourgeois de Paris, pour y recevoir les pauvres femmes mendiantes qui passaient par Paris ; elles y couchaient et étaient congédiées le lendemain matin avec un pain et un denier.

Cet hôpital était situé près de la rue Saint-Denis, ou se trouve aujourd'hui l'impasse des Filles-Dieu. Nous reviendrons sur cet établissement qui était contigu à la cour des Miracles, réceptacle de tous les vices, repaire de débauches, asile de toutes les misères et de tous les crimes, à partir du XIVe siècle.

Tandis qu'on s'occupait de toutes ces fondations pieuses, Paris était dans la consternation. Il avait perdu un clou ! Mais quel clou ! Le 27 février 1233, jour où

Le clou retrouvé.
le chapitre de Saint-Denis montrait ses reliques aux paroissiens, le bruit se répandit tout à coup que l'un des clous de la Passion, donné par le roi Charles le Chauve à l'abbaye de Saint-Denis, était égaré. Tout le monde fut sur pied dans la basilique, on chercha, on fouilla partout. Rien ! le clou avait disparu. « Cette perte consterna tout Paris qui y avait une dévotion singulière, dit un historien. Tout le monde prit part à un malheur qu'on regardait comme un présage de quelque funeste accident pour le royaume. Le roi fit publier par un héraut, dans toutes les places publiques, que celui qui rapporterait le saint clou aurait la vie sauve et cent livres d'argent. » C'était mettre un bon prix à un clou. Mais cependant personne ne le rapportait. Des prières publiques furent dites. Les larmes coulèrent et les gémissements se firent entendre.

Enfin quelqu'un accourut en toute hâte dire au roi qu'une bonne femme avait porté le clou à l'abbaye du Val, près de Pontoise. Comment se l'était-elle procuré ? Et pourquoi l'avait-elle porté à l'abbaye de Pontoise, c'est ce que l'histoire néglige de nous apprendre ; au reste, la joie était telle qu'on ne songea qu'au bonheur d'avoir retrouvé la précieuse relique qui fut reportée le vendredi saint dans Saint-Denis avec une pompe et une réjouissance extraordinaires. Voilà comment fut retrouvée cette relique dont la perte avait coûté des larmes aux clercs, aux moines, à l'Université, aux grands, aux petits de tout âge, de tout sexe et de toute condition. Après le recouvrement, le roi fut lui-même à Saint-Denis pour honorer le saint clou.

Deux ans après cet événement, les religieux de Saint-Magloire permirent aux paroissiens de Saint-Barthélemy d'ériger une chapelle sous le vocable de Saint-Leu, Saint-Gilles, qui devint paroisse en 1617 seulement.

Mais nous voici arrivé à l'édification d'une église qui est considérée à juste titre comme l'oeuvre la plus parfaite de l'architecture du moyen âge, comme un pur joyau qui a traversé les siècles et qui fait encore aujourd'hui l'admiration des artistes ; nous voulons parler de la Sainte-Chapelle. Mais d'abord, disons ce qui motiva la construction du plus bel édifice religieux de Paris.

Louis IX avait acquis de Baudouin II, empereur de Constantinople, la couronne d'épines du Christ qui fut expédiée à Venise et de Venise à Bourbon l'Archambault, « portée successivement à cheval, en bateau et en litière, » elle fut enfermée dans un coffre de fer protégé par plusieurs serrures et placée dans une tour dont les fenêtres étaient garnies de fils d'archal. Après qu'on l'eut exposée à la vénération des fidèles, le roi la porta lui-même, accompagné des seigneurs de la cour jusqu'à Sens.

De là elle vint à Paris où elle fut exposée à l'abbaye de Saint Antoine des Champs le 18 août 1239, ce fut encore le roi qui, dépouillé de ses habits royaux et vêtu d'une simple tunique de toile blanche, les pieds nus, porta la précieuse cassette à Notre-Dame et de là à la chapelle Saint-Nicolas qui se trouvait dans l'enceinte du palais. Plusieurs hommes de la noblesse lui soutenaient les bras pour qu'il ne tombât pas de fatigue. Quelques mois plus tard, Baudoin lui ayant de nouveau cédé plusieurs reliques, notamment un morceau de la vraie Croix, Louis IX conçut le projet de faire bâtir une église pour y conserver toutes ces reliques.

Ce fut la Sainte-Chapelle, qui fut construite en 1245 sur l'emplacement de la petite chapelle Saint-Nicolas. La direction des travaux fut confiée à Pierre de

La Sainte Chapelle au Palais de Justice,
fondée, bâtie en 1245, restaurée en 1837.
Montreuil, l'un des plus habiles architectes du XIIIe siècle qui avait déjà construit l'ancien réfectoire et la chapelle de la Vierge de l'abbaye Saint-Germain-des-Prés (où il fut enterré).

La construction de la Sainte-Chapelle coûta quarante mille livres tournois (huit cent mille francs) ; les reliques et les châsses avaient coûté cent mille livre tournois (deux millions). Le monument se composait de deux chapelles qui furent terminées et dédiées en 1248, ainsi que l'attestent deux inscriptions citées par Corrozet, et qui se trouvaient, d'après lui, sur le mur latéral du nord. A ce même mur était accoté un petit bâtiment en forme de chapelle et dont l'abside est représentée dans un dessin fait après l'incendie de 1776.

Ces détails sont fournis par une excellente publication sur la Sainte-Chapelle, due à M. Desmaze, conseiller en la cour d'appel de Paris, qui nous apprend que ce petit bâtiment se composait de trois étages surmontés d'une balustrade et d'une haute toiture. Au rez-de-chaussée était la sacristie de la basse chapelle, au premier celle de la haute chapelle, et le troisième étage, voûté en ogives, formait avec le comble, deux grandes chambres occupées par le trésor des chartes.

Dans la Sainte-Chapelle, par lui ainsi édifiée, ornée et embellie, le roi plaça non seulement les reliques qu'il avait acquises, mais les ouvrages de piété qu'il avait pu recueillir. « Pour les ouvrages condamnés, le saint roi les faisaient de tout le royaume apporter à Paris pour y être brûlés, moyen aussi simple qu'énergique. »

A chaque page des ordonnances des rois de France, on trouve la trace de leurs libéralités envers la Sainte-Chapelle. Le vendredi, 26 juillet 1630, sur les quatre heures de relevée, le feu prit à la couverture et au clocher, par la faute des plombiers qui y travaillaient. Le trésorier et les chanoines firent aussitôt avertir le duc de Montbazon, gouverneur de Paris, le bailli du palais et l'Hôtel de Ville, pour qu'on eût à envoyer des secours. « Lorsqu'ils furent arrivez, le clocher s'écroula et comme on crut la voulte en danger, on força la grande châsse contenant les saintes reliques, on les tira de la châsse et on les mit dans la sacristie, sous une sûre garde, en présence du bailly du palais, qui en dressa son procès-verbal. » En mars 1631, tout était réparé.

 


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