Vie quotidienne a Paris
Cette rubrique vous livre les secrets de la vie quotidienne d'autrefois à Paris, consignant les activités des Parisiens d'antan, leurs habitudes, leurs occupations, leurs activités dont certaines ont aujourd'hui disparu. Pour mieux connaître le Paris d'autrefois dans sa quotidienneté.
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DE LA CONVERSATION A PARIS
(D'après Tableau de Paris, paru en 1782)


Conversation.

Avec quelle légèreté on ballotte à Paris les opinions humaines ! Dans un souper, que d'arrêts rendus ! On a prononcé hardiment sur les premières vérités de la métaphysique, de la morale, de la littérature et de la politique : l'on a dit du même homme, à la même table, à droite qu'il est un aigle, à gauche qu'il est un oison. L'on a débité du même principe, d'un côté qu'il était incontestable, de l'autre qu'il était absurde. Les extrêmes se rencontrent, et les mots n'ont plus la même signification dans deux bouches différentes.

Mais surtout avec quelle facilité on passe d'un objet à un autre, et que de matières on parcourt en peu d'heures ! Il faut avouer que la conversation à Paris est perfectionnée à un point dont on ne trouve aucun exemple dans le reste du monde. Chaque trait ressemble à un coup de rame tout à la fois léger et profond : on ne reste pas longtemps sur le même objet ; mais il y a une couleur générale qui fait que toutes les idées rentrent dans la matière dont il est question.

Le pour et le contre se discutent avec une rapidité singulière. C'est un plaisir délicat qui n'appartient qu'à une société extrêmement policée, qui a institué des règles fines toujours observées. L'homme qui n'a point ce tact, avec de l'esprit d'ailleurs, est aussi muet que s'il était sourd.

On ne sait par quelle transition rapide on passe de l'examen d'une comédie à la discussion des affaires des insurgens ; comment on parle à la fois d'une mode et de Boston, de Desrues et de Franklin. L'enchaînement est imperceptible ; mais elle existe aux yeux de l'observateur attentif : les rapports, pour être éloignés, n'en sont pas moins réels ; et si l'on est né pour penser, il est impossible alors de ne pas apercevoir que tout est lié, que tout se touche, et qu'il faut avoir une multitude d'idées pour enfanter une bonne idée.

Les reflets, au moral comme au physique, se prêtent des lumières mutuelles. Rien de plus délicieux que de se promener, pour ainsi dire, au milieu des pensées diverses de ses voisins ; de voir si souvent l'habit qui parle encore plus que l'homme : tel ne vous répond pas, répond à sa propre pensée, et n'en répond que mieux. Le geste au lieu du discours est quelquefois remarquable ; mille faits particuliers suppléent au défaut de la mémoire et de la lecture ; et la connaissance des hommes et des choses s'apprend mieux dans un cercle que dans les meilleurs livres.


 

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