Rues et places de Paris
Cette rubrique vous livre les secrets de l'histoire des rues et places de Paris : comment elles ont évolué, comment elles sont devenues le siège d'activités particulières. Pour mieux connaître le passé des rues et places dont un grand nombre existe encore.
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RUE BERCY-SAINT-JEAN,
ajoutée maintenant à la rue Roi de Sicile
IVe arrondissement de Paris
(D'après Histoire de Paris rue par rue, maison par maison, paru en 1875)

Notice écrite en 1857. La reprise en sous œuvre a remis plus récemment à niveau les premières maisons qu'on côtoie dans la ci-devant rue de Bercy Saint-Jean, en sortant de la rue Bourtibourg. On appelle du Maché-Saint-Jean la rue large et courte qui sépare de celle Bourtibourg, la place Baudoyer : quatre ou cinq maisons anciennes y gardent encore, du côté des chiffres impairs, les numéros qu'elles portaient sur l'ancienne place du Marché-Saint-Jean.

L'Usurier honnête Homme. Le Marché-Saint-Jean. Les deux Escaliers en rivalité. Deux groupes de Propriétaires en 1786 :
N
ous avons connu un M. La Ressource, israélite, qui venait fréquemment en aide aux gens de lettres et de théâtre, avec une bonhomie qui jusqu'ici l'a empêché de se faire, pour son propre compte, éditeur de journaux, puis banquier : c'est la route qui mène aux grandes fortunes. Il prêtait à gros intérêts, et jamais ce n'était en espèces ; mais on assure qu'en somme, il n'a réalisé qu'une collection pittoresque d'autographes, protestés sur papier timbré, ce qui rend les dates authentiques. Si par hasard M. La Ressource, qui demeurait près du marché Saint-Jean, refusait de prendre à l'escompte les espérances folâtres d'un journaliste, d'un vaudevilliste ou d'une actrice, on le traitait de gredin et comme un lépreux au moyen âge ; c'était bien pis si f'affaire s'était faite, quand les billets venaient à échéance. Quel honnête homme pourtant que ce coquin ; en dehors de son petit commerce ! Dans ses moments de gêne il allait emprunter à l'un de ses débiteurs trente écus, sur parole, remboursables à la fin du mois, et il payait toujours a l'heure convenue, sans se prévaloir un instant des signatures en souffrance dont il était le détenteur, et sur lesquelles la procédure suivait son cours avec une sereine impassibilité. Combien de chrétiens ne pousseraient pas jusque là l'héroïsme obscur de la loyauté ! La parole, il est vrai, suffit dans les petites affaires ; elle établit le crédit ; mais il ne faut plus y compter le jour où il s'agit d'un coup de partie. Le symbole de la foie au serment, dans Hernani, aurait-il jamais fini par être compris si les acteurs de ce fier drame avaient porté des habits noirs, au lieu de costumes du temps de la chevalerie ?

Que s'il survit encore quelques maisons de l'a défunte place du Marché-Saint-Jean, à très peu de distance de la rue Bourtibourg, la maison habitée naguère par notre homme en est encore plus près, rue de Bercy. Elle tient bon sur deux berceaux de cave, qui n'annoncent guère une origine roturière. De ses deux escaliers, qui sentent le règne de François Ier tout au moins, l'un est à balustres de bois, l'autre est pourvu d'une rampe en fer ; le même métal se tord, comme la grille arrondie d'un notaire de cette époque-là, pour servir de balcon à des paliers qui ouvrent sur la cour. Si bien que ces deux escaliers, dont les cages se font vis-à-vis, semblent deux vieillards encore verts, qu'une jalousie égoïste pousse à épier l'instant où l'un des deux cédera le pas à l'autre ; bien loin que l'âge les ait cassés, on dirait qu'ils se penchent par curiosité réciproque, et que tous deux dédaignent de ramper comme des insectes enveloppés dans une coque de pierre : les degrés inégaux de l'un compte les marches écornées de l'autre. Il y a peu d'adnées, un des vieux locataires de la maison décrochait, pour déménager, un tableau qui pendait depuis le Directoire ; un papier vermoulu et des toiles d'araignée, qui dataient bien du Consulat, s'étaient incorporés avec le cadre et tombèrent en poussière, en découvrant quelque reste des peintures qui avaient illustré les panneaux des appartements. C'est en chaise à porteurs qu'on y arrivait autrefois, car les voitures, faute d'espace pour tourner, s'arrêtaient à une vieille arcade sur la place. Aujourd'hui la maison dont le premier étage est occupé par une synagogue, s'élève, comme ses voisines, à quelques pieds du sol abaissé de la voie publique.

Aussi bien c'était moins une rue qu'un cul-de-sac, avant que la rue de Rivoli envahit la place Saint-Jean. Dès le règne de Louis le Jeune quelques constructions s'y espaçaient. Les maisons qu'on y rencontrait à droite, en sortant de la rue Vieille-du-Temple, appartenaient quand l'ancien régime touchait à sa fin : à M. de Bellepomme ; au président de Meurat ; audit Bellepomme ; au Marquis de Versainville. Celles de l'autre côté : à M. Chapsal, dont les 4 maisons côte à côte avaient peu de temps auparavant M. de la Garde pour propriétaire ; à M. Grenier, 3 autres maisons de front ; au maître-maçon nommé Pierre, qui avait eu pour prédécesseur dans la propriété de ses 4 maisons le M. de Fénelon, et à M. Gibert.


 

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